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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




A peine une grève est terminée, une autre commence : celle des facteurs a pris fin il y a trois semaines ; presque aussitôt, les inscrits maritimes en ont déclaré une autre à Marseille. En 1904, nous avions déjà eu, presque coup sur coup, deux grèves des inscrits maritimes ; une troisième est survenue en 1907 ; nous en sommes donc à la quatrième en cinq ans, ce qui est beaucoup trop, si on songe que les intérêts en cause ne sont pas seulement des intérêts privés. De quoi se plaignent aujourd’hui les grévistes ? Leur prétexte est que la loi sur le repos hebdomadaire n’est pas strictement appliquée. En admettant que le grief soit fondé, il n’excuse nullement une interruption du travail dont les conséquences sont si graves. Les journaux ont raconté la détresse, la misère dans lesquelles sont tombés un certain nombre de passagers immobilisés à Marseille et dénués de toutes ressources. Ce sont là cependant des maux qu’on peut en quelque mesure atténuer : il n’en est pas de même, dans l’état de notre législation, de ceux que cause à la France, à l’Algérie, à la Tunisie, l’arrêt de toute communication entre elles. Quant au port de Marseille, la perte pour lui est grande dans le présent, et peut-être l’est-elle encore davantage pour l’avenir, puisque le commerce n’y trouve plus le plus précieux, le plus indispensable des biens, à savoir la sécurité.

Ce qui donne aux inscrits maritimes la force dont ils abusent, c’est qu’ils ont un monopole. Ils eu ont même plusieurs, mais nous ne parlerons aujourd’hui que de celui de la navigation entre la France et l’Afrique septentrionale, navigation qui ne peut se faire que par eux, sous le pavillon français. En outre, l’admission en franchise des produits naturels de l’Algérie n’a lieu dans nos ports que s’ils y viennent directement. Sous la double égide d’une telle législation, les inscrits maritimes peuvent élever un obstacle infranchissable entre la France