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VIII

Toutefois, les dépenses faites et les travaux exécutés risqueraient d’être improductifs si, à côté de la question du matériel, on négligeait celle du personnel. Nos compagnies d’aérostiers ont été fondées il y a plus de vingt-cinq ans ; elles étaient au nombre de 4 affectées au service des ballons captifs et de quelques ballons libres de forteresses. Malgré tous les progrès de l’aéronautique, ces quatre compagnies existaient seules il y a quelques mois ; on vient enfin de se décider à en doubler le nombre. Mesure excellente, mais probablement insuffisante ; il faudra augmenter encore l’effectif de ces troupes spéciales.

Ainsi que le faisait si judicieusement remarquer le général Langlois, dans la discussion qui a suivi au Sénat l’interpellation du docteur Reymond, la France, avec sa natalité décroissante, ne peut pas espérer entretenir sous les armes et mobiliser en temps de guerre un effectif égal à celui de l’armée allemande. Nous devons donc compenser cette infériorité numérique en mettant à la disposition de notre armée toutes les ressources que fournissent la science et l’industrie contemporaines : pour nos adversaires, c’est une chose utile ; pour nous, c’est une nécessité de premier ordre. Que faut-il pour cela ? Le général Langlois l’a dit aussi. La France est le berceau de la plupart des découvertes, il nous suffit de savoir en profiter.

D’ailleurs, il ne faut pas s’exagérer la supériorité de la flotte aérienne de nos voisins. Si, au mois d’octobre 1909, ils ont pu mettre en ligne une véritable escadre de l’air, les manœuvres exécutés à cette époque, ou depuis, n’ont pas été irréprochables. Leurs dirigeables n’ont pas plus que les nôtres un rayon d’action suffisant, et les altitudes atteintes par eux sont inférieures à celles que nous avons obtenues. Mais, sachant aussi bien que nous qu’il suffit d’augmenter le volume des ballons pour leur donner ces qualités, ils ont déjà construit des ballons colossaux de 13 000 francs et davantage. Ces géans de l’atmosphère, à côté de leurs qualités, ont leurs défauts. Ils sont tous du type Zeppelin, c’est-à-dire du système rigide ; leur construction comporte l’emploi d’une carcasse en aluminium qui pèse plusieurs milliers de kilogrammes et qui nécessite pour être enlevée un volume de plusieurs milliers de mètres cubes