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Madagascar les facilités de mise en valeur et d’exploitation, sans lesquelles tous les efforts des particuliers sont, dans les conditions actuelles, voués à l’impuissance. Les éloges que, depuis quinze ans, se décernent les fonctionnaires à tous les degrés de la hiérarchie sous la rubrique : « exécution des grands travaux d’utilité publique » ne sont pas justifiés par l’état des ports et des voies de communication. Pour diverses raisons, non seulement ils ne sont pas dignes de la colonie, mais encore ils sont un obstacle à son développement.

Rades foraines intenables pendant les moussons, refuges bien abrités vantés par les théoriciens de la guerre navale, qu’ils s’appellent Diego-Suarez, Majunga, Tamatave, Andevorante, Valomandry, Fort-Dauphin, Tulear ou Morondava, aucun des ports malgaches ne pourrait suffire aux exigences d’un trafic important. Sur la côte orientale, ils sont exposés à tous les vents, et les navires doivent les fuir ou les éviter dès les premières menaces de brume ou de gros temps. Sur la côte occidentale ils sont placés au fond d’estuaires où les courans et les bancs de sable rendent les approches dangereuses. Dépourvus de quais, d’appontemens, d’engins mécaniques, les mouvemens de marchandises et de passagers ne s’effectuent pas sans, périls, sans difficultés et sans pertes.

Diego-Suarez, seul, offre des avantages naturels de sûreté, et de facilité d’accès dont la marine de guerre a voulu profiter, mais que le commerce utilise peu. Le Nord de l’île, à qui ce port servirait de débouché, est désert, sans autre route que celle de l’Andavakoera, qui mène aux placers. Et cependant, cette région que nous possédons depuis vingt-cinq ans, où la tranquillité n’a jamais été sérieusement menacée, est probablement de tout Madagascar la partie la plus intéressante pour la colonisation. Il y a de belles forêts, de bons pâturages, des torrens nombreux. Les colons réunis dans la ville y semblent plus actifs qu’ailleurs ; outre l’exploitation aurifère dont le succès est indéniable, ils y ont fondé tanneries, salines, briqueteries, fabriques de conserves. Mais l’aspect des rues, du port, des environs démontre que la sollicitude du gouvernement ne se manifeste pas en faveur de cette région trop éloignée de la capitale.

Par sa situation géographique, et la médiocrité des ressources de son arrière-pays immédiat, Diego-Suarez n’est guère qu’un port de transit postal et de ravitaillement pour les troupes du