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génération viendra, génération plus pacifique, je l’espère. » Falk et Gneist répliquaient en parlant des droits de l’État ; l’Église, d’après eux, avait lésé ces droits par une application trop élastique d’une constitution trop vague ; aujourd’hui ses déclarations solennelles d’indocilité, voire de révolte, châtiaient l’État de sa longue abdication ; ce qu’il s’agissait de restaurer, c’était la domination de la loi.

La Constitution existait toujours tant que la Chambre Haute ne l’avait pas elle-même modifiée ; mais peu importait au Landtag ; on discuta les projets ; on les vota, comme si la modification était un fait acquis. Le Reichstag siégeait en même temps ; un certain nombre de députés faisaient partie des deux assemblées ; mais sans égard pour le Parlement d’Empire, le Landtag délibérait, le Landtag s’essoufflait ; les membres de sa majorité votaient comme de simples soldats, et s’en vantaient.

Le drapeau du germanisme, éternellement brandi contre J’ultramontanisme, fut agité par Gneist et par Renard. La prêtraille, à les entendre, avait imposé aux esprits et aux cœurs allemands certaines chaînes qui devaient désormais tomber. Limburg-Styrum faisait retentir la voix de la patrie : il fallait un clergé national, expliquait-il, afin que rien n’empêchât l’Allemagne de protéger l’Italie. Au demeurant, Gneist protestait qu’on ferait du bien à l’Église en la délivrant de la centralisation ; et Virchow observait qu’après tout, on travaillait pour la liberté personnelle des consciences, en les affranchissant de la hiérarchie. Grand merci, ripostait Schorlemer à Gneist, libérez-nous, plutôt, de la protection de l’Etat. Grand merci, ripostait Mallinckrodt à Virchow, notre liberté de conscience individuelle trouve précisément sa satisfaction à reconnaître l’autorité de l’Eglise, et ne la trouve que là. Duncker faisait au Centre cette courtoisie, de dire que l’Église avait joué un rôle utile dans les débuts du monde moderne ; mais « quand le fils est majeur, continuait-il, le fils enterre sa mère. » « La mère Eglise n’est pas morte, » ripostait Windthorst. Les orateurs nationaux-libéraux s’attachaient surtout au procès de l’Église ; ils laissaient au ministre Falk, au rapporteur Gneist et aux commissaires le soin de justifier dans le détail les projets présentés.

Le Centre et quelques protestans pieux faisaient face aux uns et aux autres. Windthorst accusait l’État de projeter une usurpation sans exemple dans l’histoire, et déclarait qu’à un lent