Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 59.djvu/625

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et s’amuser des mille détails si pittoresques des rues d’Italie. Voilà le plus délicat la première d’entre elles est-elle le plus ancien type des portes lombardes agrandies en porches. Jusqu’alors, aux vieilles églises de Pavie par exemple, les portails ne font point saillie ; ici, au contraire, une archivolte s’avance au-dessus de la baie, avec deux bas-reliefs représentant des monstres. Plusieurs autres sculptures complètent cette décoration : ce sont des scènes de la Genèse, depuis la naissance d’Adam jusqu’à Noé. Et nous avons la bonne fortune de pouvoir lire encore la signature de l’artiste avec la date de 1099, sur un cartel que tiennent les prophètes Enoch et Élie. C’est Wiligelmus ou Guglielmo, le même qui travailla à San Zeno de Vérone. Ainsi que pour l’architecture, les influences septentrionales se font sentir sur cette statuaire naissante : je n’en veux pour preuve que le portail près du Campanile dont le linteau reproduit deux épisodes de l’histoire de Renart.

A droite du porche Sud, à côté d’une jolie chaire extérieure décorée des médaillons des évangélistes, quatre petits bas-reliefs racontent l’histoire de saint Géminien ; par leur style qui décèle l’influence de Donatello, par la date de 1442 et la signature Augustinus de Florentia, ils peuvent être considérés comme une œuvre de jeunesse d’Agostino di Duccio.

La Torre Ghirlandina, construite au XIIIe siècle, complète l’imposant ensemble de la cathédrale et achève de donner une physionomie pittoresque à cette Piazza Maggiore qu’encadrent en outre le Palais de justice et le Palais municipal. Très élégant et s’harmonisant parfaitement avec le Dôme, le Campanile lance sa flèche à plus de cent mètres de hauteur : à peine en remarque-t-on la légère inclinaison vers le chœur.

L’intérieur de l’église ne répond malheureusement pas au dehors : trop de restaurations l’ont dénaturé. Et je n’y pénètre que pour descendre dans la crypte, gardée par des lions et des nains, afin d’y revoir l’Adoration de Guido Mazzoni. Mes souvenirs étaient fidèles : c’est une œuvre dont le rude naturalisme déplaît et dont l’outrance choque. Devant la Vierge, sont agenouillés une religieuse et saint Joseph ; une servante se penche, laide et mal vêtue, avec des manches déchirées. Les personnages sont indépendans les uns des autres et, somme toute, assez ridicules.

Ce groupe est loin d’ailleurs d’être le meilleur travail du Modanino ; et, pour avoir une plus exacte idée du sculpteur, il