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la faire respecter. Dès 1556, Henri II avait rendu un édit qui privait les mineurs de vingt-cinq ans, mariés sans autorisation, des droits successifs et des libéralités qu’ils pouvaient tenir de leurs parens, de la loi et de leur contrat de mariage. Cette déchéance si justifiée ne mettait pas le sacrement en question et ne portait aucune atteinte à la compétence exclusive de l’Eglise en matière matrimoniale. Mais il y avait en France bien des gens qui trouvaient le pouvoir civil trop timide, qui estimaient qu’il pouvait se prononcer, sans en référer à Rome, sur la validité du lien conjugal. Parmi eux on trouve un Rabelais, un Étienne Pasquier. C’est des cloîtres, c’est-à-dire de ce qui émeut le plus leur bile de gallicans et d’humanistes, qu’est sortie pour eux cette méconnaissance de l’autorité paternelle qui fait dire que le consentement des ascendans n’est pas nécessaire et ne doit être demandé que par déférence. Pasquier déplore que l’Eglise gallicane n’ait pas fait du défaut de consentement un cas de nullité et que la procédure du rapt de séduction imaginée pour assimiler au rapt la subornation soit inefficace et laisse le plus souvent la fille séduite aux mains du ravisseur.

Stimulé par la gravité du mal, par des encouragemens comme celui que nous venons de reproduire, le pouvoir civil prenait à cœur la réforme matrimoniale. En 1560, sur les remontrances des États d’Orléans, Charles IX soumit aux peines du rapt les séquestrations et les mariages forcés qui s’autorisaient parfois de lettres subreptices du Roi. Aux États de Blois de 1576, le Tiers demanda que les mariages ne pussent avoir lieu que devant le curé de la paroisse, dans le jour et après la publication des bans sans dispense. L’ordonnance de Blois de 1579 rendit obligatoires les publications et, en permettant la dispense des deux dernières, la subordonna à des intérêts graves et à la requête des plus proches parens. Elle exigea la présence de quatre témoins, dont les noms seraient inscrits dans le registre paroissial. Elle défendit aux curés de célébrer la cérémonie nuptiale, s’ils n’avaient la preuve du consentement des parens, sous peine d’être impliqués dans le crime de rapt auquel le mariage dépourvu de ce consentement était assimilé. Elle confirma les sanctions qui frappaient les unions non autorisées, notamment celle de l’exhérédation. Elle édicta la peine de mort contre la subornation, même quand le rapt par subornation