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reconnaissance. Les Français, moins favorisés, avaient abordé l’archipel par le Nord et par l’Ouest, beaucoup plus exposés aux rafales et à la tempête.

Confirmant les renseignemens contenus dans la publication de M. de Pagès, mais les précisant et les complétant, Cook signale des lacs et des cascades, des collines déchiquetées et des sommets couverts de neige ; près du rivage, un gazon verdoyant ; ailleurs, des touffes d’herbes grossières, dont le bétail de la Résolution se contentait. Il nomme même le petit chou de Kerguelen et ses propriétés antiscorbutiques, seize ou dix-huit plantes, parmi lesquelles des mousses et un lichen qui croît sur les roches. Il indique la tourbe comme combustible ; mais ne voit ni gisemens de charbon, ni trace d’un métal exploitable. La faune terrestre est absente et la faune marine largement représentée par de nombreuses variétés d’oiseaux aquatiques, de phoques et de lions de mer, de poissons de toutes dimensions, y compris la baleine. D’autres fourniront, à la longue, sur l’aspect de l’île et ses maigres ressources des indications complémentaires ; mais ils ne modifieront pas sensiblement l’impression que nous laisse le récit de ce navigateur incomparable.


Le capitaine Robert Rhodes, au cours d’une campagne de pêche dans les mers australes, ne resta pas moins de huit mois aux Kerguelen. Son navire, le Hillsborough, put s’abriter dans une baie du centre. De mars à octobre 1779 il fouilla avec de petites embarcations les anses et les fjords de la côte orientale, en nomma un grand nombre et n’explora pas moins de cinquante îlots. Rhodes n’a publié ni ses levers ni ses notes ; mais sir James Clark Ross, qui eut, soixante ans plus tard, ses manuscrits entre les mains, en cite plusieurs passages dans le récit de son voyage aux terres antarctiques[1] et il n’hésite pas à déclarer que les travaux de ce marin lui ont été fort utiles pour l’établissement de sa carte. C’est donc à juste titre que la baie Rhodes et la baie Hillsborough perpétuent le souvenir de ce navigateur aux Kerguelen. D’ailleurs sa campagne, féconde en résultats géographiques, ne fut pas sans profit matériel pour lui-même. Il vante ces parages où se rencontrent plusieurs espèces de

  1. A voyage of discovery and research in the Southern and antarctic Regions, 1839-1843, by captain sir James Clark Ross, R. N. vol. I, p. 65-70. London, John Murray, 1847.