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celle-là n’est pas la moindre. Dans un régime politique où le parlementarisme est poussé aussi loin que chez nous, c’est-à-dire jusqu’à ses pires abus, l’exploitation de l’État est nécessairement médiocre. Nous ne savons ce que ferait aujourd’hui la Chambre : pour ce qui est du Sénat, s’il avait à se prononcer maintenant sur le rachat die l’Ouest, son vote serait à coup sûr très différent de ce qu’il a été en 1908. Il vient d’entendre une interpellation sur la manière dont l’État administre son nouveau réseau. M. Jénouvrier en a pris l’initiative avec éloquence, et la plupart des représentans des régions intéressées, M. Waddington, M. Milliard, etc., sont verras à la rescousse. Combien le chemin de fer de l’État est loin d’être le modèle qu’on nous avait annoncé ! Il lui faut quelque temps encore, a-t-on dit, pour dégager ses perfections latentes : soit, mais, en attendant, les accidens s’y multiplient, il ne se passe guère de semaine sans qu’il y en ait un ; les souffrances du commerce et de l’industrie sont à l’état aigu ; et, si on veut bien admettre que les circonstances en sont partiellement la cause, assurément elles n’en sont pas la cause unique. On ne peut s’empêcher de croire qu’une Compagnie concessionnaire aurait mieux fait : en tout cas, le gouvernement aurait échappé à la responsabilité qui lui incombe, et qui est lourde. Si on le critique, si on l’accuse, il peut se défendre ou essayer de le faire, mais il ne peut pas se plaindre, car il n’a que ce qu’il a voulu.

Au point de vue politique, la session se termine d’une manière assez indécise. Toutes les fois qu’il parle, M. Briand a une forte majorité, mais on sent, tout de même, que cette majorité n’est pas bien solide. Nous sommes de ceux qui le regrettent ; nous souhaitons que le ministère dure, car il peut faire encore de bonnes choses et en ajourner de mauvaises. En dépit des concessions auxquelles il se croit obligé, M. Briand montre des intentions droites et fait figure d’homme de gouvernement. Enfin, bien que la matière ministrable abonde en dehors de son ministère beaucoup plus que dans son ministère même, s’il tombait aujourd’hui, savons-nous ce que nous aurions demain ?


On a beaucoup parlé de la situation diplomatique depuis quelques semaines ; on a même manifesté à son sujet des préoccupations qui paraissent exagérées et qui, d’ailleurs, commencent à se dissiper. L’origine en est dans la visite que l’empereur de Russie, accompagné de son nouveau ministre des Affaires étrangères, a faite à l’empereur d’Allemagne à Potsdam. Sa démarche a été d’autant plus remarquée