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Dans un télégramme adressé à son ambassadeur à Londres (28 juillet), et dans deux circulaires aux représentans de la Confédération du Nord, il le commenta. Le gouvernement français, selon lui, n’avait cessé de solliciter le concours de la Prusse pour réaliser ses vues ambitieuses sur la Belgique et sur le Rhin ; ces tentatives étaient devenues plus pressantes depuis que le conflit entre la Prusse et l’Autriche s’était aggravé ; la première proposition d’alliance offensive et défensive avait été présentée en termes réitérés presque menaçans, à la veille des hostilités, en mai 1866, et appuyée par une note du prince Napoléon, dont le texte était aussi entre ses mains ; quand cette proposition eut été rejetée par la Prusse, le gouvernement français, ne comptant plus sur le prix dont on ferait payer son secours, s’était efforcé d’amener la défaite prussienne. Après Sadowa, la France, à plusieurs reprises, avait fait des offres au détriment de la Belgique et de l’Allemagne : c’était d’abord, le 6 août 1866, un projet de cession de la rive gauche du Rhin, puis, en mars 1867, l’acquisition du Luxembourg, et, après l’échec de ces négociations, des propositions comprenant la Belgique et l’Allemagne du Sud, apportées par le prince Napoléon, en mars 1868, à Berlin. L’impossibilité d’acquiescer à ces projets n’avait jamais été douteuse, mais le Chancelier avait jugé utile, dans l’intérêt de la paix, de laisser aux hommes d’État français leurs illusions, sans leur faire de promesses, même verbales ; il traita leur demande d’une manière dilatoire, parce qu’il présumait que la ruine de leurs espérances mettrait en danger la paix nécessaire à l’Allemagne et à l’Europe. Il ne partageait pas l’opinion de ces politiques qui jugeaient la guerre avec la France inévitable ; les différentes phases de mécontentement de cette puissance et d’envie qu’elle a eue de faire la guerre, traversées par la Prusse de 1866 à 1869, coïncident avec les dispositions favorables ou l’éloignement que les agens français croyaient trouver relativement à leurs convoitises. « C’est uniquement, la conviction définitive de ne pouvoir arriver avec nous à une extension de frontières qui a déterminé l’Empereur à essayer de l’obtenir contre nous. Il y a même des raisons de croire que si les publications actuelles n’avaient pas eu lieu, la France, lorsque ses préparatifs de guerre et les nôtres eussent été achevés, nous eût offert de réaliser de concert, à la tête d’un million de combattans prêts à entrer en campagne, vis-à-vis de l’Europe encore