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révolutionnaires italiens étaient allés lui en demander ; ils l’avaient rejoint à Hombourg et il leur répondit que si Victor-Emmanuel prenait l’initiative de la rupture, les tendances républicaines des Italiens qui désapprouvent une pareille politique ne l’empêcheraient pas de conseiller au Roi, son souverain, de soutenir les mécontens d’Italie par de l’argent et des armes, comme ils le souhaitaient. Avant de nous envoyer ses troupes, Victor-Emmanuel eût dû les employer à rétablir l’ordre dans son royaume. Et même s’il y était parvenu, il n’aurait pu entrer en ligne avant les premiers jours de septembre, par conséquent n’aurait pu nous sauver de Spickeren, de Wœrth, de Sedan.

La vérité a tant de force que, par une singulière inconséquence, le prince Napoléon, après avoir lancé son accusation que « le pouvoir temporel a coûté à la France l’Alsace et une partie de la Lorraine, » l’a réfutée lui-même : « Quand même la France aurait accepté sans modifications le traité qui lui était présenté, nos défaites auraient peut-être empêché l’Italie et l’Autriche de le ratifier et de se déclarer pour la France battue qu’elles ne pouvaient être prêtes à soutenir que vers le 15 septembre. » Supprimez le mot peut-être : nous nous serions déshonorés par pur amour du déshonneur, sans profit…


X

Le motif véritable de l’abstention de l’Italie est ailleurs que dans le refus de livrer Rome. Les ministres italiens, dès le premier jour, avaient subordonné toute participation à la guerre à l’initiative que prendrait l’Autriche. Sans elle, ils ne voulaient rien faire. La lettre de Visconti à Arese nous le dit : « Il est naturel que l’Autriche, qui a les plus grands intérêts et les plus grands périls, prenne l’initiative. Et il me semble qu’elle ne peut se plaindre de nous si, en des éventualités quasi inévitables, elle se décide à se mouvoir, nous lui promettons notre appui, c’est-à-dire, en présence d’une guerre générale. » Or, comme l’Autriche était décidée à ne pas se mouvoir et à ne pas provoquer une guerre générale, il en résultait que, dans aucun cas et dans aucune condition, nous n’avions à compter sur le concours de l’Italie, lui eussions-nous livré tout ce qu’elle demandait.

Les causes pour lesquelles l’Autriche a refusé de nous venir en aide et d’entraîner l’Italie sont multiples. Il en est