Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/567

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jour de ses funérailles lorsque, au travers d’une foule immense, mais silencieuse et recueillie, où les yeux se remplissaient parfois de larmes, on vit passer son cercueil suivi, sans que personne y trouvât matière à rire, de son chien favori, et aussi de ses ministres à pied, parmi lesquels on remarquait M. John Burns, tenant son petit garçon par la main. Je parle surtout de l’attitude des partis. Libéraux et Unionistes reconnurent qu’il fallait, dans un intérêt national, faire trêve à leurs dissensions. Peut-être les Libéraux et le ministère en particulier s’aperçurent-ils que le vent qui soufflait alors ne leur était pas favorable. « Ils ont tué le Roi, » disait le peuple, ce peuple auquel, quelques jours auparavant, ils pensaient à demander au roi défunt de faire appel une seconde fois. Ils eurent le sentiment que l’opinion publique ne leur pardonnerait pas de mettre en demeure le nouveau roi, à peine assis sur le trône, de prendre parti dans le conflit pendant entre les deux Chambres et de résoudre, dès le lendemain de son avènement, la plus difficile des questions constitutionnelles. C’est à cette impression très juste qu’il faut attribuer la résolution à laquelle ils s’arrêtèrent de faire à leurs adversaires unionistes l’avance de propositions conciliantes. Le 11 juin, on apprenait que, dans un bureau de la Chambre, M. Asquith, M. Balfour et quelques autres membres influens des deux partis s’étaient rencontrés, et, quelques jours plus tard, la réunion d’une conférence à laquelle la question en litige serait soumise était officiellement annoncée. Cette conférence, qui comptait huit membres, se composait, du côté des Unionistes, de lord Lansdowne, de lord Cawdor, de M. Balfour et de M. Austen Chamberlain, le fils du vieux Joe, et du côté des Libéraux, de lord Crewe, secrétaire d’Etat pour l’Inde, leur leader à la Chambre des Lords, qui est le propre gendre de lord Rosebery, du premier ministre Asquith, du chancelier de l’Echiquier Lloyd George et du secrétaire d’Etat pour l’Irlande, M. Birrell. M. Winston Churchill, le secrétaire d’Etat à l’Intérieur, n’y fut pas appelé. On assure qu’il en a été blessé. Quelques jours après, la Conférence se mettait à l’œuvre, avec une certaine lenteur cependant, et l’on doit regretter qu’elle n’ait pas apporté un peu plus de hâte et d’activité dans ses travaux, car, si ses membres s’étaient réunis plus souvent sous l’empire de l’émotion qui avait secoué l’Angleterre après la mort d’Edouard VII et sous l’impression du désir général de