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pour chaque homme, 7 liv. 5 seulement dans le premier cas, 10,7 dans le second.

Prenons encore trois bâtimens italiens, le cuirassé Regina-Elena, le croiseur-cuirassé Varese, le croiseur-torpilleur Agordat. L’un, qui porte surtout des gros canons, a, par 1 000 tonnes de déplacement, 3 bouches à feu (sans compter les petits 47 millimètres) ; l’autre, armé surtout de moyens canons, en a 3,6 ; et le troisième, avec des 75 millimètres seulement, c’est-à-dire le calibre de nos batteries de campagne, en porte 9,3, toujours par 1 000 tonnes. Les équipages sont tels que chaque canon correspond comme nombre d’hommes à 18,6, à 18 et à 14,5.

Le dernier cas est le plus comparable à celui de l’armée de terre, en vertu de l’égalité des calibres. Or à terre, un corps d’armée de 41 200 hommes et officiers est pourvu de 92 pièces, soit 446 hommes par pièce.

Il est vrai que le soldat possède d’autres armes, mais le marin aussi a d’autres moyens de guerre que le canon, quand ce ne serait que ses armes défensives, la cuirasse de son bateau, et la vitesse, et les approvisionnemens. Il n’en demeure pas moins que le canon est le plus redoutable multiplicateur de la force humaine, et que là où l’on en fait plus d’emploi, le rendement moyen de l’individu est supérieur.

Le chiffre de 14 à 15 hommes par pièce, que nous trouvons ainsi sur des navires de faible tonnage tels que l’Agordat, forme comme un coefficient d’utilisation de l’homme par la marine, dans un cas où la comparaison peut s’établir avec l’armée de terre. On voit à quelle disproportion aboutit cette comparaison. Mais on sait que les petits navires sont loin de répondre à la meilleure utilisation navale. La statistique de M. Mac Kenna nous en donnait tout à l’heure une preuve, en rapprochant les résultats obtenus par des types de cuirassés dont le tonnage va croissant. Avec cet accroissement augmentent, en effet, les poids d’artillerie que le bateau est susceptible de porter pour chaque mille tonneaux de déplacement, en même temps que diminue le nombre d’hommes nécessaire par mille tonneaux : double bénéfice.

Du premier phénomène nous avons, dans un précédent article, exposé les causes et donné des exemples probans ; pour le second, nos trois bâtimens italiens nous offriront les élémens d’un calcul immédiat. L’Agordat, qui déplace 1 300 tonnes,