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jeunes hommes. Il y en a une douzaine. Les plus anciens remontent jusqu'au viie siècle et ils sont, pour la plupart, du vie. On les a tirés du sol en divers lieux, en Attique, en Béotie, au cap Sunium, dans la Grèce d'Asie et dans les îles, à Naxos, à Délos, à Rhodes, à Santorin. Ils sont en pierre ou en marbre. Quant à leur destination première, les uns furent dressés sur des tombeaux, et d'autres comme des offrandes dans les sanctuaires, et d'autres ne servirent peut-être, ici ou là, que d'ornemens. L'on déclare qu'ils ne sont pas des portraits ; et, pour l'affirmer de tous, on manque d'argumens décisifs.

Ils se ressemblent ; et chacun d'eux est tout de même caractérisé de très forte manière.

Ils ont, les uns et les autres, la même allure ; mais il y a entre eux des différences de carrure, de lourdeur ou de sveltesse : surtout l'expression des visages est, au contraire de ce qu'on dit, extrêmement variée. Le Kouros d'Orchomène a la figure la plus bestiale, campée sur un énorme cou de lutteur, tandis que le Kouros de Volomandra, au cou grêle, a de jolis traits de fille. Le Kouros géant du cap Sunium, qui était dressé devant le temple de Poséidon et, de ses yeux immenses, regardait la mer, a un visage de soleil. Les Kouroï du Ptoïon béotien font des moues bizarres et le Kouros de Théra, comme ébloui de lumière s'émerveille. Tel autre a un bon air de modestie ; un autre raille.

Les fabuleux bonshommes !… On interroge avec angoisse leurs mines simples ou affectées, le silence rieur de leurs bouches et le regard dépeint de leurs yeux.

Or, le type de ces Kouroï vient d'Égypte. Les archéologues discutent à ce propos ; mais, à maints détails, on reconnaît l'influence de l'art pharaonique : principalement, l'aspect d'ensemble est, en Égypte et dans la Grèce archaïque, le même. Les différences qu'on a indiquées ne sont pas suffisantes pour autoriser, là-dessus, aucun doute. La position des bras, celle des jambes, le léger avancement du pied gauche, les chevelures longues et qui, des deux côtés de la tête, tombent comme le klaft égyptien, la longueur mince de la taille, autant d'analogies, — ei on en signalerait facilement d'autres, — que les critiques de l'antiquité avaient aperçues : Diodore constate la parenté des statues égyptiennes et de ces vieilles statues grecques dont il faisait hommage au mythique Dédale.

En outre, on sait où et comment s'est exercée cette influence.