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MARIE-CAROLINE REINE DE NAPLES
ET
NAPOLÉON

La correspondance de Marie-Caroline avec le marquis de Gallo (1785-1806) publiée par le commandant H. Weil et par le marquis C. di Somma Circello, apporte de nouvelles et vives lumières sur la personnalité et le caractère de la célèbre reine de Naples[1]. On la savait l’ennemie acharnée de la Révolution et l’adversaire implacable de Napoléon, mais on ne connaissait pas encore dans toute leur étendue ses desseins et ses intrigues politiques. Ses lettres au marquis de Gallo, ambassadeur de Naples à Turin, Vienne, Pétersbourg et Paris, révèlent aujourd’hui toutes ses pensées et tous ses secrets. Si Chateaubriand a pu dire de Saint-Simon qu’il écrivait à la diable pour l’immortalité, on peut affirmer que Marie-Caroline écrivait avec une verve endiablée et que plusieurs de ses lettres, sans être de celles qu’on nomme immortelles, resteront. Le style en est vif, passionné et parfois brutal. La pensée est abondante, énergique, violente et fière. Des mots italiens expressifs apparaissent çà et là au milieu d’un français rocailleux, mais pittoresque et original. Elle l’avoue elle-même à Gallo : « Je vois que je fais comme Polichinelle, et que je vous écris moitié en français, moitié en italien. »

Quelle vie que la vie de cette fille de Marie-Thérèse ! Née en 1752, mariée à seize ans à Ferdinand IV des Deux-Siciles, roi faible, ignorant, lâche et débauché, elle saisit le pouvoir dès qu’elle a un fils, ainsi que l’a voulu le contrat fabriqué par Marie-Thérèse, et, pour distraire le Roi, le laisse occupé de la chasse, de la pêche et de plaisirs bas. Cependant, elle ne se

  1. 2 vol. in-12 ; Émile-Paul.