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A l’époque où naquit le premier Zoroastre, quatre ou cinq mille ans avant notre ère[1], l’antique Iran et la Perse étaient peuplés par des tribus nomades, issues de la plus pure race blanche. Une élite seulement connaissait la charrue et l’art du labour, l’épi sacré qui pousse droit comme un javelot, les moissons d’or qui ondulent comme des seins de femme et la gerbe divine, ce pur trophée du moissonneur. Les autres vivaient en pasteurs avec leurs troupeaux, mais tous adoraient le soleil et offraient le sacrifice du feu sur l’autel de gazon. Ils vivaient par petites tribus, ayant perdu leurs anciens rois pontifes. Mais, depuis plusieurs siècles, les Touraniens venus des plaines du Nord et des montagnes de la Mongolie, avaient envahi la terre des purs et des forts, l’antique Aryana Vaeya. Pépinière humaine inépuisable, les Touraniens étaient issus de la race la plus résistante de l’Atlantide, hommes trapus, au teint jaune, aux petits yeux bridés. Puissans forgerons d’armes, cavaliers pillards et rusés, ils adoraient aussi le feu, non la lumière céleste qui illumine les âmes et rapproche les tribus, mais le feu terrestre, souillé d’élémens impurs, père des noirs enchantemens, le feu qui donne la richesse et la domination en attisant les désirs cruels. On les disait voués aux démons des ténèbres. Toute l’histoire des Aryas primitifs est l’histoire de leurs luttes avec les Touraniens. Sous le choc des premières invasions, les tribus aryennes se dispersèrent. Elles fuyaient devant les cavaliers jaunes montés sur leurs chevaux noirs comme devant une armée de démons.

Les plus récalcitrans se réfugiaient dans les montagnes ; les autres se soumettaient, subissaient le joug du vainqueur et admettaient son culte corrompu.

À cette époque, naquit dans les tribus montagnardes de l’Elbourz, qui s’appelait alors l’Albordj, un jeune homme du

  1. Pline dit Zoroastre de 1 000 ans antérieur à Moïse. Hermippe, qui traduisit ses livres en grec, le faisait remonter à 5 000 ans avant la prise de Troie, Eudoxe à 6 000 ans avant la mort de Platon. La science moderne, après les savantes études d’Eugène Burnouf, de Spiegel, de James Darmesteter et de Harlez, déclare qu’il n’est pas possible de fixer la date où vécut le grand prophète iranien, auteur du Zend-Avesta, mais la recule en tout cas à 2 500 ans avant J.-C. La date indiquée par Pline correspond à peu près à la date approximative admise par les modernes orientalistes. Mais Hermippe, qui s’occupa spécialement de ce sujet, devait posséder sur la Perse des documens et des traditions aujourd’hui perdues. La date de 5 000 ans avant J.-C. n’a rien d’improbable, étant donné l’antiquité préhistorique de la race aryenne.