Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 3.djvu/646

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

résistance du Négous sur un terrain dont ce prince africain était trop mal préparé à comprendre les savantes et complexes embûches.

Le traité anglo-franco-italien du 13 décembre 1906 a été pour l’Ethiopie, ainsi que nous l’avons dit, une sorte de charte internationale. Il a lié les trois puissances voisines dans une reconnaissance de l’indépendance éthiopienne. Ce pacte et la politique qu’il imposait ont certainement beaucoup contribué à donner à l’Ethiopie, par les conventions qu’elle signa en 1907 et 1908 avec l’Italie et l’Angleterre, les limites précises que le Négous voulait depuis longtemps faire reconnaître à son empire du côté des possessions britanniques et italiennes. On a dit, à la vérité, que l’accord de décembre 1906 avait reconnu l’existence en Ethiopie de sphères d’influence étrangères, puisque, consacrant les droits de la France en ce qui concerne la ligne de Djibouti à Addis Ababa, il accordait à l’Angleterre une situation analogue sur la future voie ferrée devant traverser l’Abyssinie à l’Ouest et sur les eaux du Nil Bleu, nourricières de l’Egypte, et à l’Italie des droits mal définis de passage entre l’Erythrée et le Bénadir par l’Ouest d’Addis Ababa. Les meneurs de la campagne d’internationalisation en ont même profité pour essayer de rendre suspect à Ménélik un acte qui ruinait leurs espérances.

Il faut reconnaître cependant que jamais on n’aurait pu concilier la politique des trois puissances sans un échange d’assurances relatives aux droits qu’elles tenaient d’efforts ou de traités antérieurs. Or c’est cette conciliation qui importait avant tout à l’avenir de l’Ethiopie. Elle a certainement aidé, comme nous venons de le dire, le Négous à achever sa délimitation du côté des Italiens et des Anglais ; mais surtout elle a lié, dans une déclaration de respect pour l’indépendance éthiopienne, les puissances éventuellement ambitieuses à la France pour qui toute ambition, dans cette partie de l’Afrique, ne saurait être qu’un pis aller. Par là, l’accord de 1906 a rendu plus malaisées des entreprises contre cette indépendance. Et l’importance de ce fait prime de beaucoup, pour l’Ethiopie, celle des garanties échangées entre les trois puissances en vue d’éventualités que l’existence de l’accord tend précisément à écarter. Les actes internationaux passés par Ménélik ou conclus autour de lui