Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 3.djvu/867

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de bons Français, amoureux surtout de leur pays, qu’ils ont fait connaître et admirer aux étrangers autant qu’à nous, fort indifférens, par bonheur, à tous les dogmatismes et toutes les théories, admirant, suivant l’heure, aussi bien Lorrain que Rembrandt, Poussin que Constable, fidèles en cela à notre génie national, génie de création vive et claire par la fusion libre et spontanée des traditions locales et des traditions étrangères.

Dans cette évolution féconde, c’est Paul Huet qui, le premier, comprit et démontra la nécessité de redemander, avant tout et toujours, à la nature elle-même, directement consultée, la matière première de la représentation. C’est lui qui rappela tout de suite et ne cessa de rappeler, en même temps, que cette représentation, pour avoir une grande portée, doit traduire l’émotion reçue au tant que l’observation faite, et que, pour le savoir faire, il n’est point inutile de prendre conseil auprès des vieux maîtres dont les labeurs et l’expérience ont légué à leurs successeurs un outillage admirable qu’il serait imprudent de laisser rouiller. Il n’était que juste, semble-t-il, de rendre à ce précurseur du naturalisme, du réalisme, de l’impressionnisme qui fut, en même temps, le conservateur des belles traditions classiques, la place qu’il a mérité d’occuper, entre Jehan Foucquet et Théodore Rousseau, Poussin et Millet, Lorrain et Corot, Watteau et Diaz, Oudry et Courbet, dans l’histoire du paysage français.


GEORGES LAFENESTRE.