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mules, que je me borne à détacher du contexte et à présenter comme des axiomes.

La vie est courte et on l’emploie mal ; on l’emploie à poursuivre des rêves chimériques et l’on perd le fruit du présent.

Détournez-vous de ce qu’enseignent les orgueilleux et contentez-vous de la croyance et des pratiques de l’humble multitude.

Les traditions héréditaires ne sont pas seulement respectables à cause de leur antiquité ; mais aucun argument ne les renversera, fût-il imaginé par l’intelligence la plus déliée.

Si l’on cherche le bonheur, c’est dans la modération des désirs, dans l’observation constante de la loi morale, dans une vie pieuse et pure qu’on le trouvera et non dans la science qui n’est pas enviable parce qu’elle ne le contient pas.

Évidemment, Euripide vieillissant inclinait vers une sorte de résignation silencieuse en présence des grands problèmes qui l’avaient tant et si longtemps attiré. À quelle époque a-t-il écrit : « è gar siôpé toïs sofoïsin apocrisis » (Le silence est la réponse des sages) ? On ne le sait ; car ce mot ne nous est arrivé que dans un fragment ; mais, quelque sens particulier, du reste, qu’il puisse avoir, il est beau de toute façon et il est probable que ce silence des sages a été la dernière attitude du poète philosophe.


Au premier regard, on se demande un peu pourquoi Euripide et Aristophane ne sont pas d’accord, ou tout au moins pourquoi Aristophane a été si cruellement ennemi d’Euripide. Est-ce une question religieuse qui les a séparés ? Non, semble-t-il, puisque, si Euripide n’est pas très respectueux envers les Dieux, Aristophane l’est encore moins.

Pour ce qui est de la morale, c’est à l’inverse, mais, au point de vue de l’accord, c’est identique. Aristophane est profondément moral et Euripide aussi. Aristophane, malgré ses tableaux licencieux et ses propos obscènes, est énergiquement partisan d’une morale sévère et pure et les plus belles, peut-être, exhortations à la moralité sont parties de « cet effronté qui prêche la pudeur. »

Est-ce la politique qui les a éloignés l’un de l’autre et placés l’un en face de l’autre ? Ceci serait plus probable, plus vraisemblable ; mais encore ceci ne se voit pas très distinctement. Aristophane appartenait, soit au parti aristocratique : c’est l’opinion