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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Nous continuons d’avoir un gouvernement alité, situation nouvelle dans notre histoire politique, qui n’est pas sans quelques avantages pour le gouvernement lui-même parce qu’il est plus difficile de l’atteindre, mais n’est pas sans inconvéniens pour nous, c’est-à-dire pour nos affaires. On la bien vu à la Chambre, le 7 juin dernier. Il s’agissait de la délicate, de l’inextricable question des délimitations de la Champagne, qui a déjà causé beaucoup de tourmens à la Chambre et au Sénat et qui, suivant toutes les apparences, ne leur en causera pas moins dans l’avenir. L’attitude du gouvernement a dépassé en incohérence ce qu’on avait encore vu jusqu’alors. Il a fallu que M. le garde des Sceaux quittât le Palais-Bourbon pour aller consulter M. le Président du Conseil qui, de son lit, lui a dicté une sorte de message en contradiction absolue avec les déclarations qu’il venait de faire lui-même à l’ouverture de la séance. L’embrouillamini était à son comble et M. Caillaux, ministre des Finances, n’a pas réussi à le dissiper le lendemain. De guerre lasse, la Chambre a voté l’ordre du jour pur et simple, puis a tout renvoyé à plus tard. C’est sans doute ce qu’il y avait de mieux à faire dans le désarroi général où on était, mais ce n’est pas une solution. La question reste ouverte avec l’aggravation que l’effervescence des esprits peut lui donner d’un moment à l’autre dans les départemens intéressés. Telles sont les choses en gros : en voici maintenant quelques détails.

On sait que le gouvernement, par une fâcheuse interversion des rôles, avait remis au Conseil d’État le soin de rédiger un décret qu’il déclarait accepter d’avance les yeux fermés et dont il endosserait la responsabilité. Rarement président du Conseil a été aussi maltraité que M. Monis lorsqu’il a fait connaître au Sénat son projet d’abdication devant le Conseil d’État ; les protestations se sont c