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LE CHÂTEAU DE LA MOTTE-FEUILLY EN BERRY.

le bref du 17 septembre ; donnant le chapeau à Georges d’Amboise, archevêque de Rouen, le conseiller préféré du nouveau roi ; il apporte enfin le projet d’un traité d’alliance militaire offensive et défensive entre le Pape et le roi de France, projet avant-coureur de toutes les futures campagnes d’Italie, qui donnera à Louis l’appui du Pape, de ses parens, de ses amis et de ses alliés « touchant la conquête de Naples et du duché ; de Milan » et au Pape l’appui de Louis pour détruire la puissance des barons des Romaines et fortifier d’autant le pouvoir temporel.

Pressés par leur fougue naturelle, Alexandre et César mènent ces négociations avec une activité extraordinaire. Dès le Blois d’août, à la suite de scènes dramatiques et malgré l’opposition acharnée du parti espagnol, le Sacré Collège, sur la prière instante du Pape affirmant que la vie privée du cardinal de Valence est un scandale et que la sécularisation s’impose « pour le salut de son âme, » le Sacré Collège, dis-je, à l’unanimité, « omnes communi et concordi voto, » s’en remet à la discrétion d’Alexandre, donnant à César l’autorisation de rentrer dans la vie séculière et de contracter mariage. Aussitôt Villeneuve, baron de Trans, ambassadeur spécial du roi de France, porteur des patentes ducales du Valentinois pour César, débarqué à Ostie, se rend à Rome et s’acquitte de sa mission auprès du Pape.

Tout était, du reste, conclu d’avance. Les personnages qui « levaient accompagner César en France étaient d’ores et déjà désignés ; le splendide trousseau pour la fiancée future, d’un luxe inouï, était prêt. Toutes les merveilles de la Renaissance devaient servir à orner le cortège du royal fiancé, à harnacher superbement ses attelages, à couvrir de diamans, d’armes, de brocarts et de velours, de livrées aussi, ses compagnons et ses innombrables valets.

La flotte royale française qui devait conduire César auprès du Roi, commandée par le sieur de Sarenon et composée d’un vaisseau, de cinq galères et de deux barques, annoncée pour la fin d’août, n’arriva que le 27 octobre à Ostie. César, monté sur un beau coursier, coiffé d’une toque ornée d’une plume noire, habillé d’un pourpoint de damas blanc bordé d’or, les épaules couvertes d’un manteau de velours noir « à la mode française, » quitta Rome le 7 novembre, et suivit la rive du Tibre et tout le