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acquêts dès le jour de leurs noces, et si César venait à mourir avant Charlotte, elle aurait pour son douaire quatre mille livres de rentes de prochain en prochain « où bon lui semblerait, et laquelle des maisons du duc qu’elle voudrait choisir. S’il laissait des enfans mineurs, la duchesse aurait l’administration de leurs corps et biens, et ferait les fruits de leurs biens et héritages jusqu’à ce que lesdits enfans soient en âge compétent. » Alain émit encore bien d’autres prétentions. On lui accorda à peu près tout ce qu’il voulut, même le chapeau de cardinal pour son fils Aymon ou Amanieu. La reine Anne elle-même s’entremit et écrivit au moins deux fois au vieux seigneur, faisant l’éloge du Valentinois, promettant à Alain sa reconnaissance et celle du Roi, promettant surtout de veiller, elle et son époux, sur la fortune future des jeunes conjoints, quelque inconvénient qui put leur en arriver.

Dès le 24 mars, Alain avait envoyé à Blois pour ces négociations son fils Gabriel d’Albret, assisté de messire Regnauld de Saint-Chamans, sénéchal des Lannes ou Landes, et de maître Jean de Calvimont, lequel semble avoir joué dans toute cette affaire un rôle assez équivoque. Le 10 mai enfin, César ayant, pour complaire à son futur beau-père, signé l’acte de cession à sa fiancée de ses biens s’il venait à mourir avant elle, le contrat de mariage fut ratifié « au chastel de Blois par devant les tabellions jurés du scel, » en présence du Roi, de la reine Anne, du cardinal d’Amboise, du chancelier de France, de l’archevêque de Sens, de messieurs de Nemours et d’Orval, des évêques de Bayeux, de Viviers et autres, du sieur de Tournon, du vice-chancelier de Bretagne et des procurateurs du duc de Guyenne.

Ainsi que le fait remarquer M. Bonnaffé, la dot de la jeune princesse était mince, mais le contrat énonçait un considérant de la plus haute importance, faisant présager le rôle qu’allait jouer César dans la future conquête de Naples et du Milanais : « le Roi espère que ledit Duc, ses parens, amis et alliés, lui feront au temps à venir grands et recommandables services, et mêmement touchant la conquête de ses royaumes de Naples et duché de Milan. » La réciproque comportait l’appui des troupes royales pour le Vatican.

César, de son côté, dans le même acte, promettait de consigner ès mains d’Alain d’Albret les cent mille livres données par le Roi « pour être employées en rentes et en terres au