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REVUE DES DEUX MONDES.

Bien qu’on ait relevé le tombeau, son aspect demeure lamentable. Du beau soubassement à piliers « à l’antique » avec compartimens pour chacune des sept Vertus, il ne reste plus que des fragmens de pilastres chargés d’arabesques et les débris des charmantes figures de la Tempérance, de la Charité et de la Force dans leurs niches surmontées de leurs coquilles. Les quatre autres sont presque méconnaissables à force d’avoir été saccagées. La statue de Notre-Dame de Lorette est également fort mutilée. On aperçoit encore une main charmante qui supporte la chapelle votive. Quant à la statue gisante de Charlotte portant la couronne ducale sur ses cheveux tressés, richement vêtue, tenant le chapelet de ses mains jointes, elle était entièrement défigurée et brisée en trois morceaux lorsqu’on l’a replacée tant bien que mal sur la tombe de marbre noir. Le visage est broyé à coups de marteau. L’inscription très abîmée est ainsi conçue : « Cy gît le cœur de très haute et très puissante dame, Madame Charlotte d’Albret, en son vivant veuve de très haut et très puissant prince don César de Borgia, duc de Valentinois, comte de Diois, seigneur d’Issoudun et de la Motte de Feuilly, laquelle trépassa au dit lieu de la Motte de Feuilly, le onzième du Blois de mars de l’an de grâce mil cinq cent quatorze. »

M. de Maulde, dans sa Vie de Jeanne de Valois, dit qu’on montrait encore dans l’église un banc où la tradition raconte que Charlotte venait habituellement s’asseoir.

Sous la Restauration on avait déjà tenté une réfection du monument. La Duchesse de Berry et le Duc d’Angoulême s’étaient inscrits chacun pour une somme de douze cents francs. La restitution actuelle est due, à ce qui m’a été dit, au comte Ferdinand de Maussabré dont la famille a possédé le château de la Motte-Feuilly du Blois de septembre 1783 au Blois de septembre 1880. Le château fut vendu à cette époque à un habitant de La Châtre. Les tombeaux de Jean de Bourbon, fils de Loïse Borgia, et de son épouse Euchariste, fille de Jacques de la Brosse-Marlet, vice-roi d’Écosse (sic), sont également conservés dans la petite chapelle de l’église de la Motte-Feuilly.

Gustave Schlumberger.