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ministre de l’Instruction publique, mais il déclina cette offre, de peur que les Allemands n’en prissent prétexte pour crier à la slavisation de l’Autriche. Une lettre qu’il écrivit au président du Congrès de Francfort pour décliner l’invitation de prendre part, comme délégué de la Bohême aux travaux du Congrès, montre à quel point il était un fervent défenseur de l’intégrité de l’Autriche. Il s’y exprime comme il suit sur la situation de la Bohème et de l’Autriche :

« Que certains liens aient rattaché autrefois les pays de la couronne de Bohême au Saint-Empire, c’est un fait que personne, connaissant l’histoire du moyen âge, ne peut contester. Il est cependant bien établi que ces liens ne furent jamais si étroits que ceux, par exemple, qui unissent à l’Allemagne les pays de la Confédération germanique. La souveraineté de la Bohême n’a jamais été mise en doute ; les chefs du Saint-Empire n’ont jamais possédé, à ce titre, des droits régaliens en Bohême.

« Demander aujourd’hui, à ce pays qui n’a pas abdiqué son individualité historique, et qui ne s’est, à aucun moment, considéré comme un pays germanique, de travailler, d’accord avec les représentans du peuple allemand, à la reconstitution de l’Empire germanique, c’est vouloir créer une situation qui n’a pas de fondement dans l’histoire et pourrait menacer l’existence de l’Autriche.

« Les Tchèques, habitans autochtones des pays de la couronne de Bohème, sont de race slave et ne peuvent avoir de place dans une Assemblée qui se préoccupe d’affermir la puissance de la race allemande. Ils ne peuvent prêter leur concours à la création d’un état de choses qui serait une menace continue pour le maintien de l’Autriche comme puissance indépendante.

« Or, le maintien de cette monarchie importe non seulement aux Tchèques, mais à l’Europe même, à l’humanité, à la civilisation. Cette puissance a une mission si importante à remplir que, si elle n’existait pas, il faudrait l’inventer. »

En 1860, quand l’Autriche revint au régime constitutionnel, après la défaite de ses armées en Lombardie et la terrible crise financière qui secouait la monarchie, Palacky défendit le principe fédéraliste. La période qui s’ouvrit en Bohême après la promulgation du diplôme impérial de 1860, qui annonçait la Constitution, est celle où le mouvement patriotique prit le plus