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qui était peut-être, a un instant donné surtout, celui où l’engagement général était le plus important.

Cette inertie fut coupable, puisqu’on ne tira pas profit des efforts et des sacrifices si volontairement consentis par les troupes engagées ; pareille inertie ne pouvait résulter que d’une grande insuffisance, dans les capacités de direction et de conduite des masses. Tel qui a pu briller parfois au second rang, s’éclipse totalement au premier.

Sur l’ensemble du 4e corps, une seule division, la division de Cissey, avait réellement donné son maximum d’efforts. La division Lorencez, arrêtée longtemps dans sa marche par des impedimenta de toute sorte, avait tardé pour atteindre le champ de bataille, ne pouvant accourir au canon, à travers champs, comme l’avait spontanément fait la division de Cissey, en dépit de la chaleur et d’une marche des plus fatigantes au cours de la journée.

La nuit étant proche, nos tirailleurs, qui avaient atteint Mars-la-Tour, ne pouvaient songer à y rester, si notre division n’était appuyée, ni soutenue. Le capitaine Garcin avait été envoyé auprès du général de Ladmirault, pour lui exposer notre situation si avantageuse, et pour lui demander avec insistance, de la part du général de Cissey, l’aide nécessaire pour garder le terrain gagné, en occupant fortement Mars-la-Tour. Malheureusement, en dépit des instances de cet officier, le commandant du 4e corps crut devoir ordonner l’abandon du terrain conquis, et le repli de la division sur la rive droite du ravin de la Cuve.

Malgré les efforts surhumains produits dans la journée par tous les élémens de notre division, les troupes étaient remplies d’un enthousiasme indescriptible ; elles acclamaient au passage leur vaillant chef, qui une fois encore les avait menées à la victoire.

L’action terminée, parce que le jour avait disparu, on s’occupa a relever les blessés et à les diriger sur la ferme de Butricourt, où avait été organisée une ambulance à l’aide de nos ressources divisionnaires ; les nombreux prisonniers que nous avions faits furent conduits en arrière des troupes. L’hécatombe des Allemands dans le ravin de la Cuve et sur ses bords avait été telle que les tués s’y trouvaient amoncelés en masses épaisses, montrant bien ainsi qu’ils y avaient été littéralement écrasés.