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espérance au cœur, celle de nous frayer, les armes à la main, un des jours prochains peut-être, un chemin à travers les mailles qui nous enserrent, nous préparons tout en vue de la réalisation d’une percée à outrance.

Le chargement du soldat d’infanterie est réduit à son dernier minimum d’effets, afin de pouvoir emporter un plus grand nombre de cartouches.

On voudrait tout faire pour écarter la hideuse vision d’une capitulation, vision qui commence à nous hanter sans répit. Cette pensée d’échapper à une triste fin ne devait être, hélas ! qu’une illusion dernière.

Pour tout esprit calme et réfléchi, ce qu’on aurait pu envisager avec chances de succès les 26 et 31 août, ne pouvait l’être désormais ; nous n’avions plus ni artillerie ni cavalerie en état d’agir !

Il ne nous restait plus qu’une résolution dernière, celle de mourir en braves pour la France.

6 octobre. — Nous tentons, à 3 heures du matin, un coup de main audacieux contre les avant-postes prussiens établis entre Châtel et Lessy. L’attaque, réalisée avec plein succès, nous indique que nos hommes ont gardé toute leur ardeur.

A 1 heure et demie du soir, une forte canonnade s’engage en avant de nos lignes ; les batteries allemandes bombardent a nouveau Scy, Chazelles et Maison-Neuve.

A 3 heures et demie, la canonnade cessant tout à coup, une forte colonne d’infanterie prussienne se porte sur le village de Lessy pour l’enlever. Mais, accueillie de front, par une vive fusillade du régiment de la division Lorencez du 4e corps qui occupe Lessy, en liane et a revers par nos propres avant-postes qui sont voisins, la colonne allemande est forcée de se retirer précipitamment après avoir subi de fortes pertes.

7 octobre. — Il n’est plus fait de distribution de sel, cette denrée manquant de façon absolue. Indépendamment des chevaux qu’on abat pour les distributions de viande quotidiennes, l’armée en fournit 200 par jour à l’administration qui les transforme en viande de conserve.

La misère est telle dans les villages que nous occupons, qu’il nous faut venir en aide aux habitans pauvres par l’intermédiaire des maires ; on donne des chevaux pour leur nourriture et aussi des secours en argent. Une souscription faite à cet effet