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que comme une carrière de nature à fournir aux femmes isolées des moyens d’existence et notre attention s’est portée surtout sur celle qui était au service de la classe moyenne et urbaine. Nous avions supposé que le jour où nos investigations nous feraient pénétrer dans un autre milieu, dans celui de la grande propriété rurale, nous avions chance de rencontrer une domesticité assez différente par les rapports avec les maîtres et par l’esprit. Nous n’affirmerons pas qu’elle n’existait pas. Tout ce que nous pouvons dire, c’est que les sujets qui auraient pu la représenter ne se sont pas offerts à nous avec un caractère assez spécifique, assez tranché pour constituer une classe à part. Et, par exemple, pas plus dans les domaines, les châteaux et les hôtels de la noblesse que dans les intérieurs de la bourgeoisie, nous n’avons trouvé, à quelques exceptions près, ces vieux serviteurs, ces serviteurs héréditaires que, sur la foi d’une tradition fort accréditée, nous nous attendions à voir venir à nous. Dès à présent pourtant nous connaissons de grandes maisons où l’on savait apprécier le prix des longs services. Celle du comte d’Avaux, celle de Richelieu étaient du nombre. Dans celle des Sourdis, les domestiques se succédaient de père en fils. Le texte qui mentionne le fait, le présente, il est vrai, comme une singularité. Une tradition d’ailleurs ne saurait avoir tort, il ne lui manque jamais, pour avoir raison, que d’être bien comprise et pour cela soigneusement circonstanciée. Nous ne désespérons donc pas de pouvoir un jour confirmer la portée générale dont celle-là se prévaut. En attendant, nous donnerons sur l’économie des grandes maisons certaines particularités qui ne paraîtront peut-être pas dépourvues d’intérêt.

C’était, nul ne s’en étonnera, un intendant qui présidait au mouvement des fonds auquels donnait lieu le train de vie des grandes familles. La comptabilité de la maison de La Roche-Guyon peut, à cause de l’uniformité qu’elle présente, être prise pour modèle. La dépense de bouche et d’entretien des maîtres et du personnel à Paris, à Liancourt et dans les autres résidences du duc et de la duchesse, sur le pied de 92 personnes et de 45 chevaux, s’éleva annuellement, dans les années 1629, 1630, 1631, 1633, 1635, 1636, à une moyenne de 58 848 livres. Les sommes dont nous donnons la moyenne étaient versées, mois par mois, par l’intendant aux sous-comptables, maître d’hôtel, argentier et à leurs commis, qui répartissaient, conformément à