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pourrait faire aux fabricans de l’intérieur le développement industriel d’un territoire exonéré par la loi d’un certain nombre des charges nationales. Ce souci de l’équilibre économique explique que l’arrêté ministériel du 31 mai 1863 n’ait accordé qu’à une quarantaine d’articles manufacturés la faveur de l’importation en franchise, dans la limite des crédits annuels ; encore faut-il que les propriétaires des manufactures soient français, qu’ils se soumettent à un « exercice » permanent, que leurs matières premières soient françaises ou francisées par le paiement des droits. De plus, aucun établissement créé postérieurement au 1er janvier 1863 (limite reportée au 1er janvier 1883 par arrêté du 1er avril 1863), n’est admis à bénéficier des crédits de franchise, ce qui s’explique par le fait qu’en accordant ces crédits le gouvernement n’a voulu que respecter des droits acquis et non pas en créer de nouveaux[1]. On voit la gravité de cette réserve : aucune usine nouvelle ne peut se créer en zone, puisque le marché français comme les marchés étrangers lui seraient fermés ; les anciennes ne pourront que végéter, beaucoup d’ailleurs ont disparu déjà : c’est la condamnation de la zone à la stagnation, à la paralysie industrielle. Voilà le prix du privilège, le lourd sacrifice qu’elle a dû faire pour payer à la France ses prérogatives de neutralité douanière, ses avantages fiscaux, ses franchises d’importation agricole. N’a-t-elle pas acheté un peu cher ses faveurs ? Et reçoit-elle du moins une compensation du côté de la Suisse ?


IV

Nous avons dit quels ont été les efforts faits par Genève, du jour où elle eut séparé son histoire de celle de la Savoie, pour s’assurer, à défaut d’un agrandissement territorial toujours recherché sur la Savoie du Nord, du moins la liberté de commerce avec le duché voisin ; nous avons vu comment le roi de Sardaigne, en 1815-1816, en lui garantissant à nouveau la libre

  1. Tout récemment, la franchise d’importation a été accordée aux produits zoniens suivans : fonte, ferro-manganèse, ferro-silicium, ferro-chrome, carbure de calcium, à condition que les matières premières, l’outillage et les combustibles soient originaires de la zone française ou francisés par le paiement des droits. Les industries seront « exercées. » — Cette franchise spéciale semble devoir profiter à tout établissement créé ou à créer en zone. (Voir Tarif des douanes de 1910, p. 71 et 84.).