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marocain, comme des gardes nationaux oubliés dans leur guérite. Le choix du général Lyautey, qui venait remplacer M. Regnault à Fez, comme le général Galliéni avait remplacé M. Laroche à Tananarive, semblait leur donner raison. Quelques-uns d’entre eux avaient vu le nouveau Résident général à Fianarantsoa, Ankazobe, lorsqu’il n’était que colonel. Ils le savaient dégagé des préjugés communs dont les marsouins étaient victimes, par le souvenir de l’œuvre accomplie jadis dans les Territoires du Sud. Ils supposaient que les coloniaux ne seraient pas traités en pareils pauvres par un chef qui leur devait une partie de sa gloire, et qu’ils estimaient comme un des leurs. Ils n’avaient pas oublié que l’ancien pacificateur de la région sakalave était un partisan résolu de la fameuse « tache d’huile, » ni ce qu’il exigeait de force, de méthode et de mouvement dans l’organisation d’un pays révolté. Ils propageaient ainsi leurs opinions et leurs espérances. Et, songeant à la part de gloire que l’évolution imminente de la politique marocaine pouvait leur réserver, les emmurés de Dar-Chafaï entrevoyaient la fin des mauvais jours, loin de leur petite garnison.

Pierre Khorat.