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une fois venue, soutenu, poussé même par une opinion qui commençait à sentir le péril, il a fait volte-face. M. Winston Churchill a présenté un projet de constructions nouvelles et de répartition nouvelle des forces actuelles. Entrer dans le détail du programme de l’Amirauté serait donner à notre chronique un caractère trop technique : disons seulement que M. Churchill a parfaitement caractérisé l’objet de la loi allemande. « Le fait saillant de cette loi, a-t-il expliqué, n’est pas tant la construction de nouveaux bâtimens, bien que ce soit naturellement un fait grave, que l’augmentation du nombre de bâtimens maintenus à effectifs complets toute l’année. Une. autre escadre de huit bâtimens va être créée et sera aussi maintenue à effectifs complets. » Les Allemands n’ont pas deux méthodes différentes, une pour l’armée de mer, l’autre pour l’armée de terre : dans cette dernière aussi, les dispositions qu’ils ont prises n’ont pas eu pour principal objet d’augmenter le chiffre de leur effectif, bien que, dirons-nous comme M. Churchill, ce soit là naturellement un fait grave, mais de le rendre immédiatement disponible, de sorte que, sur terre comme sur mer, le passage du pied de paix au pied de guerre soit toujours en partie effectué. Froidement, résolument, le gouvernement anglais a pris ses mesures en conséquence. Sentant que le principal danger était pour lui dans les mers du Nord, il avait voulu y concentrer des forces plus nombreuses et il avait, pour cela, un peu dégarni la Méditerranée. L’opinion s’en est émue à l’excès, croyons-nous ; elle s’est alarmée ou on l’a alarmée de la situation qui en résulterait ; le gouvernement anglais tient toujours compte de l’opinion ; il a donc ramené une partie de ses forces au Sud et décidé que celles du Nord seraient accrues par des constructions entreprises d’urgence. Pour le moment, il n’y a rien à craindre dans la Méditerranée. « Avec la Motte de la France, a dit M. Churchill, la nôtre constituera une force supérieure à toutes les combinaisons possibles. »

Il est bon de noter que l’Angleterre compte sur le concours de notre marine sur un point déterminé : évidemment nous pouvons compter sur le concours de la sienne ailleurs. Il n’y a pas d’alliance entre elle et nous, mais des vues ont été certainement échangées et fixées sur ce qu’on aurait à faire de part et d’autre en cas de guerre. Au surplus, l’Angleterre ne compte pas seulement sur notre concours, elle compte aussi sur celui de ses colonies. Au moment où M. Churchill prononçait son discours, le premier ministre canadien, M. Borden, était à Londres avec plusieurs de ses collègues : « Je suis autorisé par lui, a dit M. Churchill, à déclarer que, si les circonstances le comportent,