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une défense de sanglier. Au manège comme à la carrière, Condé devint l’un des meilleurs écuyers de son temps. Il jouait et s’exerçait avec ses pages, dans des parties de barres à cheval, souvenir des anciens tournois et des carrousels.

On le vit figurer en 1749 à une brillante joute équestre, à la tête de deux autres princes du sang et de cent cinquante cavaliers, en dehors de la barrière Saint-Antoine. La paume était aussi l’un de ses triomphes. Dans les faveurs qu’il réservera plus tard à ses gentilshommes, il tiendra grand compte de leur adresse à ce jeu, et prisera toujours la robustesse et l’agilité des muscles. Les émigrés de l’armée de Condé s’en feront une émulation vis-à-vis de lui. Bon tireur à l’épée, il fera venir, à certaines époques, dans son palais, les maîtres d’escrime en renom tels que les Saint-Georges et les Castelvert.

Cette éducation rustique marcha de pair avec la formation intellectuelle.

Le nouveau Condé se passionne surtout pour les études militaires et en particulier pour les hauts faits de ses devanciers. C’est lui qui se fera le premier historiographe de « M. le prince le Héros, » et retracera cette vie auguste dans un récit très simple et très sincère, empreint d’une sorte de piété filiale. Son livre, qu’il qualifiera modestement d’Essai, servira de base aux historiens suivans. Sa fille Louise le parcourra un jour avec le même sentiment de respect et d’amour ; et, cédant à un noble mouvement d’indignation, elle y déchirera certaine page qui faisait tache au nom de Condé en montrant le général transfuge dans le camp espagnol.

Louis-Joseph fut rapidement versé dans les connaissances de l’antiquité. Il lisait, en bon humaniste, les commentaires de César, Polybe, Végèce ; traduisait Cicéron et les poètes latins, étudiait Télémaque et le Discours sur l’histoire universelle. Amateur de géographie, il formera plus tard à Chantilly et au Palais-Bourbon un important dépôt de cartes rares, surtout de cartes militaires, dont, à l’époque, la perfection était encore loin d’être atteinte. Il les consultait chaque jour, suivant avec leur aide les campagnes d’Annibal, de Condé et de Turenne.

A seize ans, il fut nommé chevalier de Saint-Michel, un des ordres du Roi. Il y eut chapitre à cette occasion. L’abbé de Pomponne y lut un mémoire sur la maison de Condé et fit en peu de mots l’éloge des aïeux du nouveau chevalier. « M. le Prince en