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qui, en vertu du droit des porteurs, contrôlaient les douanes des ports marocains, celles de Larache et de Tetouan aussi bien que celles des autres ports. Ici l’Espagne ne pouvait pas contester notre droit, qui était un droit privé plus encore qu’un droit public et, pour obtenir des porteurs qu’ils renonçassent à leur contrôle sur les douanes de certains ports, il était légitime qu’elle leur fournit une garantie. Ce n’était point d’ailleurs le seul arrangement que rendit nécessaire la collaboration économique imposée aux deux pays par les circonstances. Comment seraient acquittés les droits de douane altérant aux marchandises introduites par une zone et consommées dans l’autre ? Comment serait construit le chemin de fer de Tanger-Fez commun à lune et à l’autre ? Autant de questions épineuses et complexes, délicates à traiter même dans l’esprit le plus amical, plus délicates encore, si devaient peser sur elles les partis pris de la veille.

Ce que fut cette négociation, la patience minutieuse d’un annaliste s’épuiserait à le retracer. Elle fut à diverses reprises retardée par des incidens de politique intérieure : en France, par les vives polémiques qui accompagnèrent à la Chambre et au Sénat les débats sur l’accord franco-allemand ; en Espagne, par les difficultés dont fut semée la carrière laborieuse du Cabinet Canalejas. Elle fut compliquée d’autre part, surtout à son début, par des discussions rétrospectives dont on regrette aujourd’hui la bruyante stérilité, interrompue même à d’autres heures par les conflits survenus au Maroc entre les agens espagnols et français. A l’automne de 1911 une heureuse initiative du Cabinet de Madrid prescrivit aux consuls d’Espagne une attitude plus sympathique et le déplacement de certains de ces fonctionnaires mit lin à de déplorables controverses. L’ambassadeur de France, M. Geoffray, le ministre espagnol, M. Garcia Prieto, y dépensèrent une ténacité et aussi une ingéniosité dignes d’un plus prompt succès. Des techniciens distingués leur apportèrent un concours qui, pour être précieux, n’en fut pas moins une cause nouvelle et inévitable de retard. Plus de douze mois passèrent ainsi, et la curiosité publique, d’abord très éveillée, s’assoupit progressivement.

Tel qu’il est, ce traité parait répondre avec une louable précision aux intérêts en présence et à la nécessité de les concilier. La question la plus débattue a été la question territoriale. Il a