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on l’a fait, la durée des périodes d’exercice qui ont justement pour objet de tenir les réserves en haleine et de leur donner le plus haut degré de préparation militaire dont elles sont capables. Après avoir affaibli l’armée active par la suppression d’une classe dans le contingent, on affaiblit les réserves par la diminution de durée des périodes. Mais ces réserves du-moins sont-elles suffisamment encadrées ? Ont-elles le nombre d’officiers et de sous-officiers indispensables pour leur donner une solide armature ? Tout le monde savait qu’il n’en était rien, et on ne faisait rien pour obvier à un mal aussi alarmant. Une pareille indifférence ne peut s’expliquer que par l’atmosphère de pacifisme à outrance où nous avons trop longtemps vécu. On ne croyait pas à la guerre. Le réveil s’est produit en sursaut. Il est difficile aujourd’hui de regarder le danger de guerre comme chimérique ; nous avons rencontré devant nous des oppositions qui ont pris plus d’une fois le caractère d’une véritable hostilité ; notre horizon s’est couvert de nuages ; enfin le bruit des armes a retenti à nos oreilles et les journaux nous ont entretenus des péripéties d’une guerre fertile en événemens tragiques et en leçons qu’il n’est permis à personne de négliger. Alors la Chambre, à la demande du gouvernement, s’est empressée de mettre la loi des cadres à son ordre du jour. Le projet qui en est présenté a pour objet de créer un certain nombre d’unités nouvelles et d’y augmenter celui des officiers et des sous-officiers qui, en cas de guerre, serviraient de cadre à nos réserves. La Chambre a entendu un certain nombre de discours dont quelques-uns ont été très remarquables : nous citerons entre autres ceux de M. Joseph Reinach et de M. Raiberti. Enfin M. le ministre de la Guerre est intervenu dans le débat pour le résumer, répondre aux objections qui avaient été faites, défendre le principe de la loi. Il l’a fait dans une langue claire et forte qui a produit une heureuse et utile impression sur la Chambre et n’a pas été effacée par l’interminable discours dans lequel M. Jaurès a prôné le système des milices, sur lequel il avait, au préalable, écrit tout un volume. La loi a été rapidement votée par la Chambre ; il faut souhaiter qu’elle le soit non moins rapidement par le Sénat, car il n’y a plus de temps à perdre après tout celui qu’on a déjà perdu. Quelle ne serait pas la responsabilité du gouvernement de la République, si notre armée était un jour surprise avant d’être munie de l’organisme nécessaire pour faire face à toutes les éventualités ?

L’organisme le plus perfectionné n’est d’ailleurs pas suffisant pour maintenir l’armée à la hauteur de sa tâche : à côté de sa force