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tension avait diminué à mesure que l’année s’avançait ; ici, les derniers jours de décembre virent les taux les plus élevés de toute la période. Toutefois, dès les premiers jours de l’année 1908, les choses s’améliorèrent : la Banque de France abaissa son taux de 4 à 3 1/2, en même temps que Londres redescendait à 5 et Berlin à 6 1/2 ; en liquidation du 15 janvier, la moyenne des reports s’abaissa à 4 pour 100. Le 23 janvier, la Banque de France revenait à 3 pour 100, marquant ainsi la clôture de 1ère de tension que le marché de Paris venait de traverser.

En Angleterre, le contre-coup des événemens américains s’était fait sentir beaucoup plus tôt qu’en France, comme cela est naturel, les relations entre New-York et Londres étant bien plus développées qu’entre New-York et Paris. Des quantités considérables de titres américains de toute sorte, en particulier d’actions et d’obligations de chemins de fer, sont placées dans les portefeuilles anglais ; les banquiers de la Cité ont pour habitude d’ouvrir des crédits importans à leurs confrères de Wall Street[1]. L’arbitrage est actif entre les deux pays. Aussi, dès que les nuages parurent à l’horizon de la rive occidentale de l’Atlantique, la Banque d’Angleterre et tout le monde des affaires au bord de la Tamise furent-ils inquiets. Depuis le 25 avril, le taux de la Banque d’Angleterre était 4 pour 100 ; il avait été 6 d’octobre 1906 à janvier 1907, et 5 de janvier à avril. Déjà au commencement de juillet, la proportion de la réserve aux engagemens était tombée à 38 pour 100, et on s’accordait à prévoir une tension prochaine ; on adjurait les banques particulières de Londres de faire tous leurs efforts pour ne pas contrarier l’action de la Banque d’Angleterre, notamment pour ne pas se prêter à des exportations d’or vers le continent. Sir Félix Schuster, président de l’Union of London and Smiths Bank, l’un des établissemens les plus considérables de la Cité, prenant la parole à l’assemblée annuelle des actionnaires, proclamait la nécessité d’agir dans ce sens. Grâce aux efforts du monde financier anglais, vers la fin de juillet, la proportion de la réserve à la Banque d’Angleterre s’était relevée à 47 pour 100. Au début d’août, on fut surpris de voir les banques germaniques faire concurrence à la Banque d’Angleterre, sur le marché de

  1. Wall Street est la rue principale du quartier des affaires à New-York. On a pris l’habitude d’appeler de ce vocable le marché monétaire américain, comme Lombard Street sert souvent à désigner celui de Londres.