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leurs avocats naturels reprissent une voix. Ce désir était d’autant plus légitime, que dans l’état-major du Culturkampf certaines propositions étaient lancées, contre lesquelles les catholiques avaient besoin d’être armés. Telle, par exemple, l’étrange idée qu’expliquait longuement, dans un livre intitulé Lutherus Redivivus, le théologien « libéral » Baumgarten. Il voulait que l’Empire allemand, parlant un bon allemand, bien net et bien brutal, interpellât les sectateurs du papisme, et qu’il leur dît : « De votre propre aveu, vous êtes, pour le temps et l’éternité, enchaînés, en conscience, à un maître étranger, qui n’a jamais été l’ami de l’Allemagne : tout ce que par ailleurs vous pouvez garantir et promettre est subordonné à celle profession de foi ; donc vous pouvez, si vous le voulez, aller et venir parmi nous, agir, organiser des messes, et des pèlerinages ; mais devenir citoyens de l’État allemand, cela, non ! » Il y avait, au regard de Baumgarten, une incompatibilité entre les devoirs du catholique et les devoirs de l’Allemand : la privation des droits civiques devait sanctionner cette incompatibilité.

En dehors même de ces menaces, les détresses présentes offraient un spectacle dont s’indignaient les catholiques et qui leur paraissait crier vengeance : ils voyaient les bourgmestres, les instituteurs, les fonctionnaires, menacés dans leur liberté de conscience et frappés par l’État pour obéissance aux lois de l’Eglise ; la mort de l’évêque d’Osnabrück réduire à trois le nombre des évêques prussiens ; l’huissier pénétrer chez révoque de Culm pour lui réclamer une amende de 17 500 marks, et faire une ridicule saisie dont le produit net, tous frais payés, descendait à l’incroyable chiffre de 10 pfennigs : les gendarmes transporter un vicaire récidiviste dans une île à demi sauvage de la Baltique où l’accueillaient les sarcasmes et les menaces d’une populace ignorante ; les tribunaux perdre leur temps à multiplier les amendes contre l’insaisissable cardinal Ledochowski. Huissiers, gendarmes, tribunaux étaient comme engrenés dans le mécanisme que les années 1873 et 1874 avaient mis en branle ; ces inévitables cruautés leur étaient imposées par les lois ; les lois donc étaient mauvaises, et sans cesse il le fallait dire, les catholiques l’exigeaient. La presse bismarckienne, alors, criait qu’ils voulaient entraver l’entente avec Borne ; une caricature perfide montrait les chefs du Centre, debout, abrités tous ensemble sous un vaste chapeau de Jésuite, faisant barrière entre