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d’appeler aux armes, sans distinction de partis, ni d’opinions, ni d’antécédens politiques, tous les hommes de cœur et de bonne volonté, tous ceux qui, sans qu’on s’informât de leurs convictions ni de leur origine, avaient bien le droit de réclamer leur part dans la défense de la Patrie. C’est pour cela qu’à côté des élémens révolutionnaires les plus ardens, on vit être l’objet d’une faveur et d’une sollicitude particulières de ma part les représentans les plus autorisés du parti légitimiste. Je ne reculai même pas devant l’emploi d’hommes qui avaient été liés au régime impérial, mais en la loyauté et la bravoure desquels j’avais absolument foi. Nous organisâmes une armée, plusieurs armées. On en a beaucoup médit, mais il y a eu des efforts énormes dont je veux parler sans vanité, car ils ont été le fruit de la collaboration assidue du pays tout entier. Je ne partage pas le moins du monde l’opinion qui nous abaisse devant l’étranger et à nos propres yeux, laquelle consiste à dire que la France était dans un état de décadence morale et matérielle si grand qu’elle n’a pas fait ce qu’elle devait. Au contraire, le pays a tout donné, et les hommes et l’argent, sans compter. On s’est bien battu aussi bien que pouvaient le faire des troupes inexpérimentées qui n’avaient à leur tête que le petit nombre d’officiers qui nous restaient et quand il était si difficile de s’en procurer ! À ce point de vue donc, la guerre a été ce qu’elle pouvait être, et aucun peuple dans le monde n’aurait été capable d’un pareil effort, alors que l’armée permanente était tout entière aux mains de l’ennemi. »

A la surprise que Saint-Marc Girardin et d’autres membres de la Commission d’enquête témoignaient d’avoir vu mettre à la direction du ministère de la Guerre un ingénieur des Mines, Gambetta avait répondu : « C’est un des plus distingués élèves de l’Ecole polytechnique. C’est un homme qui a dirigé l’administration des mines et des chemins de fer. Il n’était pas militaire, mais il n’y a pas là de quoi s’étonner. C’est un homme parfaitement capable, tout à fait à la hauteur des fonctions dont il a été chargé, qui les a admirablement remplies, et je ne vois pas qui aurait pu le remplacer. »

Pour se rendre un compte exact de ce que le délégué à la Guerre avait fait, il convient de scruter à fond les détails de la formation des corps nouveaux, des préparatifs, des approvisionnemens en armes, munitions et vivres, alors que tout