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que l’auteur s’étend sur les diverses formes des cataleptiques, les dimètres, les trimètres, les octonaires pour passer aux anapestiques, aux phérécratiens, aux asclépiades… » J’abrège ; mais les introducteurs de ces chinoiseries, eux, n’abrégeaient pas. Il n’est pas surprenant que les élèves ne se destinant pas, dès le collège, à l’Académie des Inscriptions ou à une chaire du Collège de France se soient demandé ce qu’ils allaient faire dans cette galère. Si on voulait encombrer celle-ci de « science, » ne valait-il pas mieux y évoquer des faits plus accessibles ? ou bien, — mais ceci était plus dangereux, — y faire discuter des théories initiant les jeunes esprits à des problèmes plus émouvans ? Les classes d’histoire et de philosophie ont alors empiété sur l’enseignement supérieur, et trop de jeunes maîtres ont servi à leurs élèves ce qu’ils auraient dû réserver pour leurs thèses de doctorat et pour leurs futures leçons de facultés. On ne voit pas qu’il soit sorti de là de quoi nous orienter plus sûrement dans le domaine de la croyance ou dans celui de l’action politique. Ce qui est plus visible, c’est qu’il est difficile, aux examens du baccalauréat, de trouver un candidat qui puisse expliquer dix vers de Racine ou dix lignes de Bossuet sans faire trois ou quatre contresens. Aucune acquisition solide, aucune formation durable n’ont dédommagé de l’affaiblissement des traditions qui avaient fait les générations précédentes.

A l’autre pôle, on voyait bien les instituteurs des villes et des gros villages monter dans la hiérarchie sociale, mais y monter par la politique. les élèves y ont-ils gagné ? On n’a organisé pour eux ni apprentissage ni préapprentissage. Quant à ces connaissances générales qui devaient émanciper l’électeur et consolider le citoyen en lui donnant la conscience de ses devoirs, on peut mesurer le chemin qu’elles ont fait. Des coups de sonde jetés de plus d’un côté ont révélé la misère de cette instruction affaiblie encore par une diminution surprenante de la régularité scolaire.

A-t-on fait du moins quelque chose de bon pour les couches intermédiaires où doivent se recruter, dit-on, les commerçans, les industriels, les hommes d’action, les hommes nouveaux indépendans de la culture latine, mais prêts à entrer victorieusement dans ces luttes où ce n’est plus Rome et encore moins les Grecs, mais l’Anglo-Saxon et le Germain qui sont les maîtres ? Pour cette clientèle on avait créé l’enseignement moderne ;