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Voilà des idées générales sur lesquelles tout le monde, ou à peu près, s’accorde effectivement en Angleterre comme aux colonies. Seulement, comme toujours quand il faut concilier deux principes qui, à première vue, semblent opposés, qui le seraient certainement, si on les poussait à leurs conséquences extrêmes, — l’autonomie locale et l’unité impériale, — il se trouve des gens qui préfèrent conserver un peu plus de l’un, mais il en est aussi qui sont disposés à retenir davantage de l’autre. C’est entre eux qu’est aujourd’hui le débat, et l’écart entre leurs points de vue reste considérable.

Quelles sont donc les deux conceptions en présence, qui se sont nettement affirmées à la Conférence impériale ? Et d’abord, quel est le programme des impérialistes proprement dits, de ceux que frappe avant tout l’unité impériale ? Le premier d’entre eux fut Disraeli ; puis, venus des deux partis opposés, lord Rosebery et lord Salisbury se rallièrent l’un et l’autre à l’idéal impérialiste ; mais c’est M. Joseph Chamberlain qui s’en fit le champion. Dès juin 1890, devant le Congrès des Chambres de commerce de l’Empire britannique, il formule tout le plan d’action de l’impérialisme pur.

Je crois, dit-il, qu’une connaissance plus approfondie doit tendre à compléter notre entente et qu’elle fera entrer dans le domaine de la politique pratique ce magnifique rêve qui a enchanté tous les plus grands et les plus patriotes de nos hommes d’État, aussi bien dans la métropole qu’aux colonies ; ce rêve de nous voir réaliser une union, au sein de laquelle des États libres, jouissant chacun de leurs institutions indépendantes, seront cependant inséparablement unis pour la défense d’intérêts communs et l’accomplissement d’obligations réciproques…

Pour atteindre ce but, la première étape, déclare M. Chamberlain, consiste à réaliser l’union commerciale de l’Empire ; celle-ci faite, il existera naturellement, pour en surveiller le fonctionnement, un conseil qui examinera toutes les mesures relatives aux voies de communication et au commerce impérial. Il aura même, ajoutait le ministre des Colonies, à s’occuper de tout ce qui regarde la défense de l’Empire, — cette défense n’étant autre chose que la protection du commerce impérial, — et, par voie de conséquence, il ne pourra se désintéresser des affaires extérieures. « Graduellement, conclut-il, nous arriverions ainsi à un résultat qui différerait peu, s’il en différait aucunement, d’une fédération complète de l’Empire. »