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mer, à recevoir cet enseignement, qui ne leur donnera pas les aptitudes mécaniques aujourd’hui nécessaires ; mais, en revanche, la flotte peut, avec des ouvriers de terre, faire des mécaniciens utiles au grand commerce. C’est une raison pour ne pas prendre indistinctement tous les inscrits et pour prendre large proportion de non-inscrits.

Ce sera faire naître, encourager, féconder les aptitudes et les vocations maritimes prêtes à germer dans le pays, pour le plus grand avantage de notre marine marchande et de toutes nos autres industries, dont celle-ci représente la voiture de livraison outre-mer.

L’Inscription maritime, en résumé, date d’une époque où la marine avait peu de rapport avec nos provinces de l’intérieur. Elle répondait à des conditions générales dont il ne reste plus rien. La marine de guerre différait à peine de la marine de commerce, partout alors semblable à elle-même. Pêcheur ou gabier, le matelot, du seul fait de son métier, arrivait dans les flottes royales tout préparé à son rôle nouveau. Souvent même il avait tiré le canon en corsaire ou contre les pirates barbaresques. L’instruction militaire des équipages se réduisait à rien. Mais la levée des classes faisait supporter aux populations côtières une lourde charge ; et les armemens permanens étant d’autre part nuls en paix, ou peu s’en faut, l’armée de mer ne consistant donc qu’en réserves, il était juste et nécessaire de compenser cette charge et de recruter ces réserves par des faveurs, en particulier, par la demi-solde.

De ce tableau tous les traits ont changé ; des règlemens mêmes de Colbert rien ne subsiste, si ce n’est, comme le disait en 1866 déjà le ministre d’Etat Rouher, la pensée qui les inspira. Cette pensée a été féconde, mais elle était née d’élémens trop altérés depuis lors pour continuer à s’appliquer avec fruit à notre état nouveau. Il serait temps de renoncer à y chercher le principe d’une organisation maritime à laquelle les transformations du monde moderne donnent d’autres bases.


VI

A défaut de son lumineux esprit, il paraîtra malaisé de fixer le point d’équilibre entre ces exigences maritimes éternelles et ces besoins industriels nouveaux qui vont former la double loi