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Il faut admirer les parties décoratives que le maître a eu le temps d’exécuter et par-dessus tout le décor des pendentifs de la coupole, par des motifs sculptés qui représentent les symboles des évangélistes et qui sont au nombre des plus délicats chefs-d’œuvre de la sculpture italienne. La façade, avec sa partie centrale convexe que bordent des lignes droites, avec sa terminaison carrée que surmonte un brillant motif de sculpture, est certainement au point de vue de la grâce la plus jolie façade de cet âge. Borromini, dans sa façade de Saint-Charles, est brutal à côté de Pierre de Cortone, et si, dans celle de Sainte-Agnès, il est plus imposant et plus fort, il n’a pas le charme délicat de l’art de son rival.

Pierre de Cortone fut l’auteur de deux autres façades d’église, celle de Sainte-Marie de la Paix et celle de Sainte-Marie in via lata. La façade de Sainte-Marie de la Paix, qui fut très admirée, est remarquable par les artifices qui donnent un aspect majestueux à la façade d’une église petite et mal placée dans une rue étroite. Pierre de Cortone a obtenu ce résultat en faisant une architecture de peintre, où tous les effets sont empruntés aux ressources de la perspective, en disposant sur des plans différens un petit portique d’entrée, puis le corps de la façade et en arrière un édifice circulaire qui l’enveloppe, faisant supposer plus en arrière encore d’importantes constructions qui n’existent pas.

A Sainte-Marie in via lata, plus que dans aucune de ses autres œuvres nous retrouvons le maître épris de classicisme. C’est l’esprit antique qui inspire cette façade conçue comme un double portique où tout l’effet réside dans un motif de colonnes répété au rez-de-chaussée et au premier étage, avec cette particularité très rare d’un entablement surmontant les colonnes. Et tout cela est si voisin des formes grecques que les néo-classiques se sont crus obligés d’en parler avec quelque indulgence. Le Cicerone, qui s’oublie jusqu’à traiter de caricature la façade de SS. Luca e Martino, dit de Sainte-Marie in via lata que c’est une des œuvres les plus pures de cette époque ; et Milizia dit également qu’elle est universellement estimée.

Carlo Rainaldi est aussi un classique, mais n’étant ni un sculpteur comme le Bernin, ni un peintre comme Pierre de Cortone, il fut plus qu’eux un pur architecte et par là il se rapproche