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REVUE DRAMATIQUE


Comédie-Française : Le Ménage de Molière, comédie en cinq actes et six tableaux, en vers, par M. Maurice Donnay. — Athénée : Le Cœur dispose, comédie en trois actes, en prose, par M. Francis de Croisset.


La nouvelle pièce de M. Maurice Donnay était très attendue des lettrés. Elle a pleinement rempli cette attente ; Les cinq actes du Ménage de Molière forment un charmant spectacle où les souvenirs classiques et le tour moderne de la sensibilité, les grâces de l’esprit, l’agrément du style, la facilité des vers font le plus harmonieux ensemble. On y prend beaucoup de plaisir ; et on a cette impression, qu’on n’a pas toujours au théâtre, de prendre un plaisir de littérature.

On a fait beaucoup de pièces sur Molière ou autour de lui. Pourquoi sur Molière plutôt que sur tel autre, Corneille, par exemple, ou Racine ? Pour bien des raisons qu’on aperçoit sans peine. D’abord, il est plus près de nous : la moyenne de l’humanité se reconnaît davantage dans son théâtre. Passionnément épris de la vie, il a été, pour cette cause, un de ces écrivains dont l’œuvre dégage une intensité de vie vraiment extraordinaire. Puis il n’est pas seulement un écrivain, mais, comme Shakspeare, acteur et directeur de troupe, il est, par là même, en contact direct avec la foule, si curieuse des choses et des gens de théâtre ! Sa destinée a été aventureuse, éclatante et courte. Il a connu les succès les plus enivrans et aussi les pires souffrances, qui ne sont pas celles du mal physique minant l’homme encore jeune et dans la force du génie, mais bien les tortures d’un cœur supplicié par la jalousie.

Molière a été ce personnage douloureux : le mari d’une coquette. C’est cela que nous avons retenu de sa biographie et qui en fait, à nos yeux, l’intérêt de psychologie. Ainsi, et à sa manière, Armande