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Et, si je dois chanter le verger, ses abeilles,
Ses fruits qui font craquer l’osier fin des corbeilles,
Ses lumineuses fleurs, son herbe de velours
Enflant de mon troupeau la mamelle aux pis lourds,
Où trouverai-je encore, à ton culte fidèle,
Un plus suave exemple, un plus riche modèle ?
Catulle, érigeons dans ce calme verger.
Parmi les chers trésors qu’il saura protéger.
Le vigilant gardien, le Priape champêtre
Que nous dégrossirons au cœur de ce vieux hêtre ;
Et, si quelque effronté pillard, en maraudant,
Se trouve face à face avec le Dieu, pendant
Que le voleur déçu s’enfuira, d’un franc rire
Nous scanderons sa fuite au lieu de le proscrire.
Et ce sera comme un vierge écho de jadis,
Alors que, cultivant des pavots et des lis.
Caché dans ton enclos ceint de roses grimpantes.
Tu glissais vers la mort sur les plus molles pentes,
Non sans mettre en tes vers glorieux à jamais
Les rêves qu’enivré de grâce tu formais.

À THÉOCRITE


Théocrite, agreste aïeul, que n’es-tu là,
Toi dont la verve en vers amoureux s’exhala ?
Que n’es-tu là, fluide et tendre Théocrite,
Tandis que, dans le pré, ma jument favorite,
Que l’on a mise au vert pour la première fois,
Avec agilité bondit... Bien qu’absent, vois :
Son oreille dressée au moindre bruit remue.
Et son cœur bat plus fort dans sa poitrine émue.
Soudain, comme l’appel d’un désir véhément.
Au soleil printanier vibre un hennissement
Que la sonorité de l’écho répercute
Et qui trouble en son vague et mâle instinct de brute
Quoique jeune étalon dont la novice ardeur
Flaire dans le vent tiède un effluve rôdeur.
Ah ! que n’es-tu témoin avec moi de ces choses,
Dans leur line harmonie ingénument écloses,