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réalisé notre protectorat marocain aura attaché son nom à notre histoire politique et coloniale : il aura rendu un de ces services qui ne s’oublient pas.


En attendant la solution des autres difficultés internationales que le traité n’a pas réglées, il en est une qui, dès maintenant, impose à notre diplomatie des négociations dont la lenteur même prouve qu’elles sont délicates. Avons-nous besoin de dire qu’il s’agit de l’Espagne ? Nous avons des engagemens directs avec elle et, quand même nous n’en aurions pas, nous devrions tenir compte de la situation particulière que l’Acte d’Algésiras lui a reconnue, comme à nous-mêmes, au Maroc. Au surplus, nous ne sommes pas seulement en présence d’un droit, mais encore d’un fait : au moment où nous avons entamé notre marche sur Fez, l’Espagne s’est elle-même établie à Larache et à El-Ksar, faisant acte de possession sur la zone que nous avions éventuellement abandonnée à son influence. Cette initiative, peu opportune sans doute à l’heure où elle s’est produite, était pourtant légitime : elle devait appeler de notre part des réserves, mais non pas des protestations. Tout cela d’ailleurs appartient déjà à l’histoire ; il n’y a plus aucune utilité à en discourir ; mais il devait y être fait quelque allusion dans notre traité avec le Sultan. L’Espagne à cause de sa zone, l’Angleterre à cause de Tanger ne pouvaient pas y être passées sous silence. Notre protectorat s’étend sur tout le Maroc, soit ; mais certains points du territoire seront soumis à un régime spécial dont il fallait faire mention, sans qu’il fût d’ailleurs possible de le préciser, puisqu’il y avait là matière à une négociation qui était encore pendante. C’est ce qui explique le caractère un peu vague des deux derniers paragraphes de l’article 1er dont voici le texte : « Le gouvernement de la République se concertera avec le gouvernement espagnol au sujet des intérêts que ce gouvernement tient de sa position géographique et de ses possessions territoriales sur la côte marocaine. De même la ville de Tanger gardera le caractère spécial qui lui a été reconnu et qui déterminera son organisation municipale. »

Il y a lieu de croire que les difficultés relatives à Tanger, s’il en existe, s’aplaniront facilement. Tanger est en fait, depuis plusieurs années déjà, une ville internationale, elle restera une ville internationale : son organisation municipale lui assurera ou lui maintiendra ce caractère. C’est une idée acceptée de tout le monde que l’Angleterre ne saurait admettre que Tanger, en face de Gibraltar, appartint à une