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militaire allemande seule le mérite de ses succès. Si l’armée grecque a combattu suivant les méthodes allemandes, elle avait été préalablement organisée et exercée suivant les méthodes françaises. Le Roi doit venir prochainement à Paris : peut-être y trouvera-t-il l’occasion, non pas assurément de revenir sur ce qu’il a dit, mais de le compléter. Nous ne voulons pas donner plus d’importance qu’il ne convient à cet incident pénible, mais il y aurait un défaut de dignité en le passant sous silence à ne pas paraître sentir ce qu’il a eu de peu obligeant pour nous. Le roi de Grèce nous donne, à son tour, une leçon qui est déjà vieille, qui nous revient de partout et dont la morale est que nous devons, comme le font si bien les autres, diriger notre politique d’après nos intérêts, et non pas d’après nos sentimens. On se trompe quelquefois sur ses intérêts, mais, combien les sentimens sont une source d’erreurs plus abondante ! Nous n’avons plus à compter, dans ces affaires balkaniques, les déceptions qu’ils nous ont causées.

En dépit des vacances, qui sont d’habitude une période de tout repos, il y a partout en Europe, avec un désir de paix qui a été rarement aussi vif, un malaise qui a plutôt une tendance à s’aggraver qu’à se dissiper. Un symptôme de ce mal apparaît dans les dispositions de l’opinion italienne à notre égard : de l’opinion, disons-nous, car il n’y a aucun motif de croire que le gouvernement y soit pour quelque chose. Mais les faits se multiplient et se répètent. Il y a quinze jours, nous avons dû parler des attaques de la presse italienne contre la nôtre à propos des îles de la mer Egée. Nous aurions voulu n’avoir pas à revenir si vite sur ce sujet ; mais comment faire ? Une interview accordée par M. Barthou à un journaliste italien a mis de nouveau le feu aux poudres. Avons-nous besoin de dire que M. le Président du Conseil s’était exprimé dans les termes, non seulement les plus mesurés, mais les plus amicaux pour l’Italie qu’il admire et qu’il aime ? N’a-t-il pas lui-même, tout récemment, fondé avec M. Pichon une association intitulée : « France-Italie, » dont le but est de resserrer les liens entre les deux pays ? Mais M. Poincaré ? On a créé en Italie la plus étrange et la plus mensongère des légendes, d’après laquelle M. le Président de la République serait animé de sentimens tout différens. Rien de plus absurde que cette calomnie, dont l’origine remonte aux incidens du Carthage et du Manouba. M. Barthou a protesté que M. Poincaré aimait l’Italie comme lui-même et au surplus il a rappelé que la politique de la France était aujourd’hui entre ses mains et celles de M. Pichon. Jusque-là, c’était bien : malheureusement,