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armées de la Moselle et du Rhin et aura une influence décisive sur les opérations de ces armées. »

Des officiers allemands, plus présomptueux encore, s’imaginaient que Liège pourrait être enlevé brusquement ou simplement tourné et qu’on pourrait facilement longer Namur par Gembloux et Charleroi. D’autres avaient affirmé qu’il était permis de compter sur la complicité du gouvernement belge qui se bornerait à de simples protestations. L’opération devait être menée en deux jours avec une armée de premier choc, presque exclusivement composée de troupes actives.

Aussi l’attaque brusquée par la Belgique et le Luxembourg n’a-t-elle pas pris notre état-major au dépourvu. Toutes les mesures propres à parer aux dangers créés par la concentration des Allemands sur le front d’Aix-la-Chapelle, de Trêves et d’Eisenborn avaient été silencieusement prises, et les places fortes françaises mises et tenues en état. Après nous avoir tâtés, il y a quelques jours, sur les lignes de Longwy, Nancy, Belfort et se sentant bloqués, les Allemands estimèrent qu’il leur restait comme passage la trouée de Charmes entre Épinal et Toul et la trouée de Stenay entre la frontière belge et Verdun. Mais là, ils avaient devant eux de fortes positions soutenues par de puissans ouvrages. Ils se résolurent donc à envahir le Luxembourg belge et la province de Namur, croyant que la résistance de Liège et de Namur ne serait pas de longue durée et que l’armée belge plierait comme un roseau devant les forces allemandes. On sait ce qui est arrivé. Les Allemands, venus d’Aix-la-Chapelle, ont envahi le 4 août le territoire belge à Recht et à Visé, marchant directement sur Liège que commandait le vaillant général Léman qui, sommé de se rendre, répondit par un énergique refus. Le roi Albert fit aussitôt appel à la France et à l’Angleterre pour la défense de la neutralité belge, et les deux puissances répondirent avec empressement à son appel. L’ère des difficultés et des désillusions allait commencer pour les Allemands.

Il importe de constater que les Belges, dûment avertis du danger qui les menaçait, ne se sont pas laissé endormir. L’annonce des grands préparatifs faits par les Allemands en 1911, l’installation de cinq corps d’armée allemands sur leur fron-