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pression développée par la poudre noire est, sous une densité de chargement égale à 0,5, d’environ 2 100 kilos, elle est d’environ 1 200 kilos pour le coton-poudre ; sous une densité de chargement égale à 0,9 (c’est-à-dire 9 décigrammes de substance par centimètre cube) la pression développée par la poudre noire est, de 5 100 kilos et de 38 000 kilos (plus de sept fois supérieure) pour le coton-poudre. Malheureusement, la pression développée par celui-ci l’est dans un temps très court ; il s’ensuit que ses effets brisans sont énormes, ce qui en ferait, d’après ce que nous avons vu, une poudre propulsive et fusante très imparfaite et de nature à détériorer rapidement les armes à feu. En outre, le coton-poudre, — à l’encontre de la poudre noire qui a une parfaite stabilité, — est déplorablement instable et capricieux ; sous les influences les plus diverses et les plus légères, il se décompose, le frisson de l’onde explosive l’ébranlé soudain, et ce sont alors des accidens terribles et contre lesquels aucune précaution n’est vraiment efficace avec cette terrible et fantasque substance.

Aussi, lors des essais poursuivis dans presque tous les pays civilisés afin de substituer le coton-poudre à la poudre noire, les catastrophes furent, pendant de longues années, si répétées et si terribles (la plus affreuse en France détruisit complètement en 1848 la poudrerie du Bonchet) que la plupart des gouvernemens renoncèrent complètement à son emploi. Dès lors, le coton-poudre ne fut plus destiné qu’à être employé, après avoir été légèrement humidifié, comme explosif brisant dans le chargement des mines marines et des torpilles, et il rend encore dans ce domaine les plus grands services.


La poudre noire paraissait définitivement triompher de sa cotonneuse concurrente lorsque les travaux de l’illustre chimiste français Vieille donnèrent à la question un tour nouveau que rien ne laissait prévoir.

Lorsqu’on traite le coton par l’acide nitrique suivant l’exemple de Schönbein, on n’obtient pas en réalité un seul type parfaitement défini de coton-poudre, mais un produit plus ou moins nitré, suivant que le traitement a été poussé plus ou moins loin. Le coton-poudre le moins nitré, le moins pénétré d’acide azotique peut être dissous dans un mélange d’alcool et d’éther en formant le collodion, si cher aux photographes et aux médecins[1]. Le coton-poudre le plus nitré et

  1. Rappelons que le celluloïd, ce dangereux parvenu de l’industrie moderne, n’est lui-même qu’une association de collodion et de camphre.