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absolue. Avant que les mesures qui découlent de cette décision n’entrent en application, — et leur efficacité dépendra de l’énergie qu’on apportera à les réaliser, — il ne sera peut-être pas inutile de rappeler en quelques mots les causes des mouvemens passionnés d’opinion qui ont abouti, — mieux vaut tard que jamais, — à cette décision tant attendue.

Les principaux pays producteurs de coton sont l’Egypte, l’Inde, l’Afrique occidentale, et surtout les États-Unis, les trois premiers marchés sont sous le contrôle des Alliés. Restaient les États-Unis qui, depuis le début de la guerre, et par l’intermédiaire de neutres complaisans, ont importé en Allemagne des quantités considérables de coton.

Les chiffres suivans, qui indiquent les importations de coton brut dans quatre pays neutres voisins de l’Allemagne, respectivement du 1er août 1914 au 30 février 1915, et dans la période correspondante un an auparavant, sont édifians à cet égard :


1914-1915 1913-1914
Hollande 121 705 tonnes 8 532 tonnes
Danemark 8 965 — 1 025 —
Norvège 25 275 — 3 270 —
Suède 177 500 — 7 272 —
333 445 — 20 099 —

De nombreux intérêts privés, où le lucre entrait peut-être autant que l’amour de la liberté, ont lutté longtemps pour empêcher la déclaration du coton comme contrebande de guerre, tant parmi les grands manufacturiers de Manchester que parmi les producteurs des États du Sud et des États-Unis. Non contens d’invoquer leurs intérêts assurément fort respectables, ils se prétendaient assurés que les Allemands pouvaient fort bien se passer du coton brut et le remplace raient facilement, si besoin était, par la cellulose extraite des vieux chiffons, du papier, ou de la pulpe de bois. La statistique précédente allait évidemment un peu à l’encontre de cette prétention ; de même le fait que le prix du coton brut était, il y a deux mois, six fois plus élevé à Brème qu’à Liverpool. D’ailleurs, nous avons des raisons de croire que, depuis une quinzaine de jours, aucune quantité de coton, si minime soit-elle, ne peut plus en Allemagne être employée pour des travaux non militaires. Enfin, l’illustre chimiste anglais, sir William Ramsay, le Christophe Colomb des nouveaux gaz de l’atmosphère, n’a cessé d’affirmer dans toute la campagne retentissante dont il a pris la