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comportait. Certes, les circonstances sont difficiles, mais M. Venizelos ne les regarde pas comme au-dessus de son intelligence et de son courage, puisqu’il n’a accepté la charge de constituer le ministère qu’après une enquête de plusieurs jours sur une situation politique et internationale dont il a voulu d’abord connaître tous les secrets. Son enquête terminée, il s’est mis à l’œuvre sans plus tarder avec une autorité qui était déjà grande lorsqu’il était au pouvoir et qui a encore grandi par la manière dont il l’a quitté. Mais que fera-t-il ? Quelle décision prendra-t-il au sujet de la démarche que les Alliés ont faite à Athènes comme à Nisch ? Quelle solution donnera-t-il au problème délicat qui lui est posé ? Si nous nous en tenions aux deux admirables lettres qu’il a adressées au Roi en janvier dernier et qui ont déterminé sa retraite, nous n’aurions aucun doute à ce sujet ; mais nous ne pouvons pas oublier qu’en quittant le ministère, M. Venizelos a dit que, même s’il y revenait, il ne pourrait plus réparer le mal qui avait été fait, et on a pu constater depuis qu’au cours de sa campagne électorale, il a exposé aux électeurs une politique assez sensiblement différente de celle d’autrefois. Il y a donc pour nous une part d’inconnu dans ce qu’il fera demain. Et pourtant, si nous regardons seulement la situation générale, elle est peu changée. La démarche que les Alliés viennent de faire à Athènes ressemble presque trait pour trait à celle dont M. Venizelos avait été l’objet lorsqu’il a écrit ses lettres au Roi. Il s’agit toujours de désintéresser la Bulgarie de manière à obtenir son concours et à assurer l’avenir de l’hellénisme en Asie Mineure, à côté des autres peuples appelés à régénérer ces pays qui ont été autrefois si florissans et où le génie de la Grèce et de Rome s’est manifesté avec tant d’éclat, sans parler de celui des Puissances qui, à des époques plus récentes, y ont laissé une marque non moins profonde de leur action civilisatrice. La lice est déjà ouverte à la concurrence.

Quant à la Bulgarie elle, est en tout cela la partie prenante. On ne lui demande rien en fait de territoires ; c’est elle qui demande, et on lui offre beaucoup. Son attitude est toujours la même, attentive, expectante, énigmatique, peut-être simplement indécise. Cependant M. Radoslavof a dit à diverses reprises que la neutralité ne pouvait être le dernier mot de sa politique et qu’elle en sortirait un jour prochain.


Nous ne faisons pas ici une étude militaire sur les opérations qui viennent de se produire et qui continuent en Pologne, en Courlande, en