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accompagnent la brigade française, débouchée comme eux de Pervyse, dans une charge générale vers Stuyvekenskerke. Les Allemands fléchissent un peu d’abord. Mais le combat, devient bientôt dur et lent et, tragiquement, s’immobilise. Le 8e chasseurs français est héroïquement décimé. En face de cette première aile marchante, c’est vers le même village de Stuyvekenskerke que, venant de l’Ouest, convergent des grenadiers, des carabiniers et le 10e de ligne, qui, furieux d’avoir dû reculer, attaque maintenant avec une folle intrépidité. Mais là aussi la lutte sanglante et indécise piétine le sol, ne marque que lentement notre avance. Au Sud, le groupe venu de Dixmude se jette en avant, se déploie à hauteur d’Oudstuyvekenskerke aux maisons duquel il s’accroche solidement, attaque la ferme Den Toren, rétablit définitivement les nôtres dans les tranchées de la borne 16. De Saint-Georges où le 5e de ligne contre-attaque, jusqu’aux abords de Dixmude, la bataille fait rage dans toute la demi-lune que dessinent l’Yser et le chemin de fer. De temps à autre, un mouvement se produit, des bataillons reculent, d’autres avancent. Un témoin note le courage éclatant de quelques compagnies du 10e de ligne qu’on voit courir résolument en ligne de pelotons dans la zone battue par la grosse artillerie, « les obus arrivaient en rafales, les hommes se couchaient instantanément, puis se relevaient et continuaient à avancer. C’était quelque chose d’admirable. » Mais en somme, si l’un des buts de l’offensive est atteint : contenir l’ennemi, — on ne parvient pas, comme on l’avait espéré, à le rejeter dans le fleuve. Le village lui-même de Stuyvekenskerke et la ferme Den Toren ne seront repris, — et pour quelques heures, — que le lendemain. Du moins, Dixmude est préservée désormais par le Nord. De la ferme Roode-Poort où elle se soude au remblai du chemin de fer, une ligne solide se constitue jusqu’aux tranchées et à l’Yser. Pour éclairer les soldats qui, pendant la nuit, fortifieront ingénieusement ce front, l’un des réservoirs à pétrole, touché par un gros obus, se penchera brusquement, tandis qu’une flamme gigantesque jaillira jusqu’au sommet du ciel, en un subit et vertigineux saut.

Les Allemands, au moins, ne perdent pas de temps. Se voyant barrer sur la rive gauche la route de Dixmude, ils vont lâcher sur la ville par la rive droite toutes leurs troupes disponibles. Furieux d’être contenus au Nord, en ce jour qui devait