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montrait une différence très notable entre les anciens domaines du Hohenzollern et ses acquisitions plus récentes ou, pour prendre une limite géographique, entre, ses provinces héréditaires au-delà de l’Elbe et ses nouvelles provinces en deçà[1].

La Poméranie, vieille province de la monarchie prussienne, tombait de 1,55 à 0,39 ; la Westphalie, en deçà de l’Elbe, montait de 0,93 à 1,97. Le développement industriel de la Westphalie et de son bassin houiller était l’une des causes du phénomène. Mais le même développement industriel n’avait pas empêché la Silésie, au-delà de l’Elbe, de tomber, en cette même période, de 1,23 à 0,86. Il semblait qu’en vérité, le régime prussien eût commencé, même avant 1871, d’épuiser en ses vieilles provinces les services qu’il était capable de leur rendre : un peu de liberté leur eût été plus profitable que beaucoup de caporalisme. En outre, l’Empire avait eu pour premier résultat d’ouvrir le reste de l’Allemagne à l’émigration plus fruste de ces provinces orientales : c’est par centaines de milliers que les ouvriers agricoles et industriels de la vieille Prusse avaient, depuis trente ans, passé de ce côté de l’Elbe pour demander du travail aux fermes du Hanovre et aux usines du Rhin. Ainsi l’Empire, — et c’était pour les pessimistes un sujet d’alarmes, — avait profité aux autres terres allemandes beaucoup plus qu’à cette terre de la Prusse, qui devait néanmoins subvenir aux besoins de l’Empereur et aux charges de l’Empire.

C’est qu’à ces Allemagnes de l’Ouest et du Midi, le Hohenzollern avait apporté ce qu’elles n’avaient pas connu depuis Charlemagne, ce que le régime napoléonien lui-même ne leur avait pas donné : une gérance des intérêts généraux. Après les quatre ou cinq siècles de l’ancien régime, dont les besoins du prince et les intérêts de la dynastie étaient la loi suprême, Napoléon leur avait procuré les bienfaits d’une administration régulière ; après lui, pour se gagner le cœur de leurs sujets

  1. ACCROISSEMENT ANNUEL POUR 100

    1816-1864 1864-1910 1816-1864 1864-1910
    Prusse orientale 1,43 0,34 Brandebourg 1,26 1,57
    Prusse occidentale 1,64 0,67 Sleswig-Holstein 0,75 1,05
    Poméranie 1,55 0,39 Hanovre 0,37 0,92
    Posnanie 1,29 0,70 Westphalie 0,93 1,97
    Silésie 1,23 0,86 Hesse-Nassau 0,77 1,02
    Saxe prussienne 1,11 0,99 Prusse rhénane 1,18 1,63