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comme ces conférences formées en vue d’unifier la défense nationale qu’il vient de présider et auxquelles il a tenu le langage le plus viril. On en a vu quelques traits : la conclusion mérite encore plus d’être citée. « Nous avons, a-t-il dit, une grande tâche devant nous ; nous y concentrerons tous nos efforts, soutenus par le pays entier. Laissons de côté pour le moment toute autre préoccupation, quand même elle serait grave, quand même elle concernerait l’État, si elle n’est pas essentielle dans le moment présent. Rien ne doit distraire nos pensées, notre volonté, nos forces du but maintenant unique qui est de chasser l’ennemi de nos frontières. Dans ce dessein, nous devons avant tout assurer le complet équipement militaire de notre armée active, ainsi que des troupes convoquées sous les drapeaux. Cette tâche vous est désormais confiée, Messieurs : je sais que vous consacrerez toutes vos forces, tout votre amour pour la patrie à son accomplissement. Au travail, avec l’aide de Dieu. »

Ce sont là des paroles réconfortantes. La force du pays en ce moment est dans cet échange de confiance qui va de lui au souverain et du souverain à lui. En dépit de ses échecs provisoires, la Russie a été admirable sur les champs de bataille : peut-être l’est-elle encore davantage dans l’immense effort qu’elle fait sur elle-même pour se mettre à la hauteur de sa tâche. Ici et là, elle aura désormais son empereur à sa tête : où ne le suivrait-elle pas ?


Nous avons dit qu’en notifiant à M. le Président de la République sa prise de possession du commandement de ses armées, l’empereur Nicolas avait voulu rendre plus manifeste leur solidarité avec les nôtres : c’est à une pensée du même genre qu’a obéi le général Joffre dans la visite qu’il vient de faire à l’état-major italien, où il a été présenté au roi Victor-Emmanuel. Quelque nécessaire que soit en France la présence permanente de notre généralissime, on a pensé avec raison qu’il pouvait faire en Italie un voyage rapide pour apporter à nos amis et alliés, sous la forme qui devait leur être le plus sensible, l’expression de notre sympathie. Depuis qu’ils sont entrés en guerre, les Italiens ont fait de la bonne besogne. Rien chez eux n’a été livré au hasard : ils ont agi avec une méthode dont les résultats semblent infaillibles. L’honneur principal en revient au roi Victor-Emmanuel qui laisse la plus grande liberté d’action au général Cadorna et a certainement bien placé sa confiance. Quant aux troupes italiennes, elles sont admirables d’élan quand on leur permet de s’y livrer, de patience lorsqu’on les y condamne, et toujours de hautes vertus militaires.